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2016, une année de transition

Par Jean-Luc Autret

L’année bissextile de 2016 ne restera pas gravée très profondément dans la mémoire des amateurs de boxe québécois. Si les années précédentes nous ont habitués à assister à plusieurs combats de championnat du monde dans la belle province, les derniers douze mois ont été bien pauvres. Malgré ça, il y a toujours moyen de trouver du positif. Voici mon bilan personnel de l’année 2016.

Qui a eu la plus belle année?

Soyons honnêtes parmi les gros noms de la boxe d’ici, personne ne s’est démarqué. Jean Pascal a vécu l’enfer face à Kovalev et il vient de faire un combat de retour; Lucian Bute a obtenu un généreux verdict nul puis le dopage à l’ostarine a occupé le reste de son année; Eleider Aleider patiente en écoutant les belles promesses de son promoteur; Adonis Stevensen a fait une seule apparition, et ce, en plein milieu des vacances de la construction; David Lemieux a fait du surplace en affrontant les Glen Tapia et Christian Rios, Artur Beterbiev a été sans pitié contre Maderna et Prieto, mais ces rivaux sont très loin de l’élite.

Bref, aucun d’eux ne mérite le prix de boxeur de l’année. Mais qui donc sera l’heureux élu… Vous le saurez dans un article qui sera publié dans quelques jours.

Les nouveaux retraités

Kevin Bizier a l'entrainementSans faire sonner douze coups de cloches, je tiens à souligner plusieurs boxeurs qui ont accroché leurs gants dans la dernière année. À qui pensez-vous en premier? Votre choix devrait être le sympathique Kevin Bizier. Le boxeur de Québec a choisi de passer à d’autres choses après avoir subie une correction d’une durée de moins de cinq minutes. Avec un chèque de 400 000 $, on part le cœur un peu plus léger. Personnellement, mon seul regret de ne pas avoir vu le boxeur de Québec accepter d’affronter Devon Alexander en mai 2013. Depuis ce combat, l’ancien champion de l’IBF a perdu 3 de ses 4 combats…qui sait si Kevin avait dit oui à l’époque.

Manny Pacquiao et Ghislain MadumaJe me dois de souligner aussi la retraite du souriant Ghislain Maduma qui aurait mérité de finir sa carrière d’une autre façon. Le Congolais d’origine restera certainement encore longtemps dans le petit monde de la boxe. Soulignons qu’il sera activement impliqué dans l’organisation du défi des champions au début de février prochain.

La retraite est souvent précédée de peu par une dure défaite. Ce fut le cas cette année pour Éric Barrak, qui a été couché par le vétéran Raymond Olubowale en trois rounds, de Didier Bence, qui a souffert face à Avery Gibson ou encore Pascal Villeneuve, qui a été assommé par Guillaume Coudé. Le coriace Frank Miville a aussi choisi d’accrocher ses gants, lui qui gagne très bien sa vie à l’extérieur du ring.

Certains peuvent aussi croire que l’on ne reverra plus sur un ring les Kevin Lavallée, Renan St-Juste, Michel Tsalla et Adam Green. Mais comme, il n’y a pas eu d’annonce officielle dans leur cas, je leur souhaite simplement de la santé en 2017.

Plusieurs nouveaux visages

batyr-fait-son-entreeÀ l’opposé des nouveaux retraités, il y a les recrues. Les derniers douze mois ont permis à quinze boxeurs de passer chez les pros. Clairement, la recrue la plus impressionnante se nomme Batyr. Avec huit victoires, 7 par KO, on a rarement vu au Québec un nouveau boxeur se démarquer aussi rapidement.

L’arrivée de Patrice Volny est aussi digne de mention, lui qui a récemment changé d’entraînement et qui cumule 3 KO en 4 combats. Soulignons aussi que Constant Chabot et Stéphane Lachance n’ont pas eu peur d’organiser un gala à Thetford Mines mettant en vedette quatre boxeurs à leurs débuts, soit les Dave Leblond, Pier-Luc Martel, Mike Breton et Sébastien Roy. Dans le même sens, les Chann Thonson (1-0-0), Jordan Balmir (2-0-0) et Joël Thériault (1-0-0) poursuivront leur apprentissage le 21 janvier lors du prochain gala de Rixa Promotions. Je souligne aussi la récente victoire de Roodsy Vincent qui a brillé à Gatineau après avoir été assommé en juillet, belle preuve de résillience.

Ceux que l’on aimerait revoir

Les amateurs de boxe aiment voir nos boxeurs locaux l’emporter, mais ils sont aussi souvent fâchés lorsque des étrangers se transforment en canne de tomates ou en gros jambon et qu’ils offrent un spectacle plus que décevant.

Dierry jean Sismundo nulCe n’est pas facile de faire du « matchmaking » et parfois les rivaux se révèlent trop fort ou simplement surprenants. Voici cinq boxeurs étrangers que j’aimerai revoir au Québec dans le futur. Mon premier choix est évidemment, il a fait un verdict nul avec Dierry Jean et il a vaincu Ghislain Maduma. Connaissant la compétitivité de Camille Estephan, il est prévisible que Batyr Jukenbayev affrontera tôt ou tard le japonais d’adoption Ricky Sismundo.

Le vétéran Darnell Boone s’est frotté à Schiller Hyppolite et il a très bien fait avec un court délai. Âgé de 36 ans, le boxeur d’Atlanta serait un test très valable dans le futur pour Erik Bazinyan. Dans le même sens, Avery Gibson a performé face à Didier Bence et Éric Martel-Bahoéli, c’est avec joie que nous avons annoncé en primeur son duel avec Simon Kean le 28 janvier prochain.

Le Québec compte sur plusieurs boxeurs évoluant à 140 livres, j’aimerai bien revoir le Mexicain Franciso Javier Perez (15-8-1, 11 KO), qui a envoyé au plancher Yves Ulysse Jr ainsi que le Russe Evgeny Pavko (15-0-1, 10 KO) qui a couché Ayaz Hussain en un seul petit round. La liste des boxeurs d’ici qui peuvent les affronter est longue…

Nos boxeurs sur la route

shakeel-phinn-champion-canadienSi des étrangers surprennent parfois nos petits Québécois, on peut se demander si nos boxeurs aussi gagnent sur la route. Et bien oui, c’est parfois le cas. Soulignons, le cas le plus particulier Shakeel Phinn qui ne se limite pas de gagner, mais qui remporte un titre canadien dans la ville de son rival. Et comme ce n’est pas assez, le boxeur de Brossard l’a aussi emporté à Toronto et à Moncton.

On se rappelle, évidemment, David Lemieux qui passe le KO à Glen Tapia en 4 rounds à Vegas. Je souligne que Simon Kean a remporté rapidement la finale d’un gala à Mississauga en Ontario et que Sylvera Louis a accumulé une fiche de 1-1 à Toronto en 2016. Chez les perdants, on se rappelle Schiller Hyppolite qui a mis à risque ses classements mondiaux en Allemagne, Jo Jo Dan qui a accepté d’être le 3e remplaçant à Philadephie, Éric Martel-Bahoéli qui perdu une décision unanime en France, Kevin Bizier qui s’est fait détruire en Angleterre et Frank Cotroni qui a vu lui filer le titre canadien à Saskatoon.

Fusion et transition

Le mercredi 20 juillet, le petit monde des médias couvrant la boxe ont été surpris par l’acquisition d’InterBox par le crédible homme d’affaires Camille Estephan. Bien que l’entité fondée en 1997 demeure, l’organisation de Eye of The Tiger Management, comme les boxeurs, cohabitent avec ceux d’InterBox.

Détenir InterBox pour Camille Estephan a eu une importante plus-value pour l’ensemble de son organisation. La majorité des amateurs occasionnels de boxe connaissent parfaitement InterBox alors que plusieurs d’entre eux ignoraient l’existence de Eye of The Tiger Management. De plus, l’arrivée des Jean Pascal, Yves Ulysse Jr et David Théroux ont fait de cette grande organisation la plus importante en nombre au Québec dépassant le Groupe Yvon Michel.

fusion-interbox-eottmMais, comme dans toute bonne organisation, certains finissent par y perdre. Ce fut notamment le cas de Mick Gadbois, qui est redevenu agent libre après deux ans avec le promoteur installé à Dorval, et de Will Madera, qui a fait quatre combats en quinze mois. Il y a aussi Dierry Jean, qui a été largué pour des problèmes judiciaires, et Ghislain Maduma, qui a accroché ses gants en octobre. Enfin, nouvelle de dernière heure, Jean Pascal et InterBox se séparent pour incompatibilité de vision…

Bref, il y a eu un rajeunissement certain avec l’arrivée des Ulysse (28 ans), Théroux (22 ans) et des deux talentueux Kazakhs de 25 ans Batyr et Ablai. Est-ce que Mikael Zewski (27 ans) se joindra à ce groupe? Il me semble qu’avec un gros gala de prévu à Trois-Rivières en mai et la présence d’un autre Trifluvien, Simon Kean, les astres sont bien enlignés.

Une année de consolidation? Vraiment

Certains seront peut-être surpris d’apprendre que le Groupe Yvon Michel a présenté huit galas de boxe en 2016. Il s’agit d’une amélioration certaine en nombre puisqu’en 2015, ils en ont organisé seulement quatre. Par contre, si l’on compare l’importance des galas, nous avons assisté à une très grosse diminution de l’ampleur des événements. Les galas de 2015 étaient tous d’importance alors qu’il y a eu qu’un seul grand événement cette année.

Yvon Michel et Adonis StevensonYvon Michel nous l’a lui-même répété à de nombreuses reprises cet automne, son organisation a versé plus de 10 millions en bourse en 2015. Cette année, bien que l’on ignore la somme exacte, c’est probablement moins que la moitié. Pourquoi une telle diminution, il y a plusieurs explications. La principale est évidente, Adonis s’est battu à trois reprises en dix mois (Sukhotsky, Bika et Karpency) alors qu’il n’est monté sur le ring qu’une fois en 2016 face à Williams.

Un autre grand changement avec les dernières années chez GYM ce fut la très faible activité de PBC au Québec. Alors qu’il y a deux ans on nous promettait « la lune et le soleil », rappelez-vous Yvon Michel devait être le promoteur attiré pour le Canada et le nord-est des États-Unis et plusieurs prospects de grands talents se joindrait à l’organisation. Le bilan de PBC avec GYM en 2016 se limite à un gala au Centre Bell devant 800 spectateurs payants (selon une source interne de GYM) le 4 juin, puis à un gala à Québec en plein milieu des vacances de la construction. Et la disette de PBC n’est pas terminée, ils ont choisi de ne pas présenter Beterbiev-Prieto et Bute-Alvarez. C’est à se demander si Adonis Stevenson sera vraiment en action en avril à Québec avec la télé américaine.

Beterbiev, Ramsay et Alvarez chez RivalRécemment, Yvon Michel m’a avoué que la dernière année a été difficile parce qu’il ne contrôlait pas son propre agenda et qu’il devait constamment attendre après des dates de télés fournies par son pourvoyeur Al Haymon. Dorénavant, ce ne sera plus le cas, dès le 9 février les galas au Casino de Montrél seront diffusés en direct sur les ondes de TVA sport. De plus, son entente avec Gestev à Québec comme partenaire lui facilitera grandement la vie dans l’organisation de gros galas comme celui du 24 février. Il est aussi annoncer que les Beterbiev et Rivas auront des opportunités d’avancement aux États-Unis plutôt qu’au Québec. Enfin, les nouvelles recrues de GYM qui seront confirmés dans quelques jours sont d’une qualité reconnu. Le Français d’origine camerounaise Christian M’billi-Assomo est un olympien qui lance beaucoup de coups, il devrait être un poids moyen qui va attirer les regards.

Selon moi, le plus important défi de GYM en 2017 sera d’attirer les spectateurs en grand nombre. Si on est généreux et que l’on dit qu’il y avait 3000 spectateurs payants lors de Stevenson-Williams, on peut estimer que GYM a vendu approximativement 7000 billets dans l’ensemble de son année (800 le 4 juin, une moyenne de 400 billets pour les 5 galas au Casino et 1000 à Gatineau). C’est très peu !!! Vivement une grosse foule pour Bute-Alvarez.

En passant, si Yvon Michel répondait à mon évaluation, il me corrigerait en disant qu’il y avait 2300 spectateurs le 4 juin, 4560 fans le 29 juillet, 650 amateurs lors de chacun des cinq galas et enfin une salle comble de 1200 spectateurs le 23 décembre. Donc, un grand total de 11 310 personnes qui se sont déplacées dans l’année. On en conviendra, même ce chiffre-là rime avec échec.

Eleider Alvarez: Quatre revirements en douze mois

Enfin, je ne peux pas faire un bilan de l’année sans parler de la plus grande injustice qui a sévit en 2016. Le 10 décembre dernier, une heure environ après la fin de Alvarez-Dabrowski, Yvon, Eleider et Lucian ont rencontré les médias pour officialiser le combat du 24 février. À ma grande surprise, Yvon a interpellé les nombreux représentants des médias qui se sont posés de multiples questions sur ce volte-face. Contrairement à lui, je ne crois pas que les interrogations ont été créées par le fait que nous apprécions Eleider Alvarez et que nous lui souhaitons un combat de championnat.

bute-alvarez-face-a-faceJe couvre la boxe québécoise depuis maintenant plus de sept ans et je crois que la majorité de mes confrères et consœurs sont amplement capables de la part des choses et qu’ils ne sont pas des fans finis à la recherche de « selfie » ou d’autographes. Bien au contraire, je crois que la majorité des questions qui sont restées sans réponses ont été créées par les déclarations antérieures d’Yvon Michel. Pour bien vous le démontrer, voici un petit exercice de mémoire des douze derniers mois qui risque de vous surprendre.

Eleider Alvarez et Isaac ChilembaLe 28 novembre 2015, il domine Isaac Chilemba et il passe du 5e aspirant à l’aspirant obligatoire d’Adonis Stevenson. J’en profite pour vous mentionner que la WBC ne prévoit pas de délai limite pour qu’un champion affronte son obligatoire. À l’IBF, c’est neuf mois; à la WBO, c’est six mois.

Un mois et demi plus tard, soit le 15 janvier 2015, Yvon Michel déclare à RDS : « …si le combat contre Kovalev tombe à l’eau, Adonis va procéder à sa défense obligatoire au début du mois d’avril ». Démontrant le peu de crédibilité de certains anciens rivaux de Stevenson, il ajoute : « Ce serait tout un combat pour Adonis. Contrairement à Tommy Karpency qui s’entraînait dans le garage de son grand-père, Eleider Alvarez est un athlète parfaitement entraîné et sérieux ».

Évidemment, en avril dernier, Stevenson et Alvarez ne s’affrontent pas. La raison donnée : l’absence de notoriété d’Alvarez. Pourtant, les Sukhotskiy, Bika et Karpency n’ont pas ensemble autant de gains qu’Alvarez face à des tops 15 de la division. Le plan d’Al Haymon, Yvon Michel et d’Adonis Stevenson est alors d’affronter Edwin Rodriguez, un cogneur ayant seulement perdu contre Andre Ward. Malheureusement pour lui, il est passé KO au second round le 30 avril par un certain Thomas Williams Jr; le nouveau détour pour éviter Alvarez.

Certains l’ont probablement oublié, mais, l’été dernier le plan d’Yvon Michel était d’opposé à Alvarez l’ancien champion du monde Chad Dawson le 29 juillet (duel annulé suite à une blessure de Dawson), puis en septembre le colombien devait vaincre Jean Pascal. «Si Alvarez devait vaincre Dawson et Pascal, ça serait un mégacombat pour la télé internationale de voir Alvarez contre Stevenson», déclarait Yvon Michel au début juillet.

Retournement de situation en septembre. Alvarez, lui qui a fait une décision face à Robert Berridge le 29 juillet, n’a plus besoin d’affronter ni Dawson, ni Pascal. « Ce n’est plus qu’une question de budget. On arrive à la fin de l’année financière et les réseaux de télévision arrivent à la fin de leurs ressources financières et ce n’est pas impossible que le combat soit présenté au début de l’année 2017 », affirme Yvon Michel lors de la présentation de sa programmation 2016-2017.

Puis brusquement, au début de décembre, en seulement trois jours, on organise Bute-Alvarez pour le 24 février avec comme récompense un duel avec Adonis Stevenson le 22 ou le 29 avril. Je souligne qu’à travers cette année d’instabilité, le Groupe Yvon Michel a été incapable d’organiser un face-à-face entre Adonis et Eleider. Curieusement, Stevenson ne participe plus aux différents événements montréalais de son promoteur depuis qu’il a été hué par la foule le 4 juin.

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Bref, des tonnes de questions restent sans réponses !!! Quel Yvon Michel doit-on croire? Celui de janvier annonçant le duel en avril; celui de septembre promettant le combat à la fin de l’année; celui de juillet nous justifiant des duels avec Dawson puis Pascal ou enfin celui de décembre qui garantit un duel avec Stevenson pour le gagnant du 24 février. Vous comprenez mieux maintenant pourquoi de nombreux journalistes sont septiques !!!

En terminant, je me dois de rappeler que Lucian Bute participera à son second combat éliminatoire pour affronter Adonis Stevenson. En décembre 2013, un certain Mauricio Sulaiman, alors no 2 de la WBC, affirmait : «Je vous confirme que le gagnant du combat entre Jean Pascal et Lucian Bute deviendra aspirant obligatoire à la ceinture de Stevenson. Il va s’agir d’un combat éliminatoire. Il s’agit du combat le plus important de l’histoire de la boxe canadienne alors c’est normal que l’enjeu soit important ». Une autre promesse brisée, est-ce vraiment surprenant ?

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