Cinq autres «prix atypiques», incluant la meilleure décision prise par un boxeur dans le feu de l’action au Québec en 2013!

Par Martin Achard et Andréanne Lambert

L’équipe de 12rounds.ca a remis la semaine dernière ses prix pour l’année 2013 dans les catégories habituelles (boxeur de l’année au Québec, meilleur combat, etc.) dans l’article que voici. Afin de compléter ce tableau classique de fin d’année, nous avons fait paraître il y a quelques jours une première série de «prix atypiques», soulignant d’autres aspects qui ont contribué à définir l’année 2013 en boxe au Québec, pour le meilleur ou pour le pire. En voici aujourd’hui la suite!

Meilleure décision prise par un boxeur dans le feu de l’action: Sébastien Bouchard (contre Frank Cotroni, le 8 juin au Centre Bell)

Sébastien Bouchard avait signalé en entrevue tout de suite après le combat le changement stratégique qu’il avait rapidement opéré dans son combat contre Frank Cotroni, et il a eu la gentillesse de répondre à nos questions lorsque nous préparions cet article pour confirmer et préciser certains points.

Le représentant du Club de Boxe Empire à Québec et son entraîneur, François Duguay, avaient remarqué en étudiant des vidéos que le droitier Cotroni avait l’habitude de tomber vers l’avant en lançant sa main arrière, et la stratégie qu’ils avaient prévue pour l’affrontement entre les deux Québécois consistait donc à bloquer ou à esquiver la première attaque de Cotroni, puis à le contre-attaquer immédiatement pour tirer avantage de son débalancement. Dès le premier round, toutefois, Bouchard s’est aperçu que Cotroni, même s’il tombait de fait vers l’avant, faisait accompagner son mouvement d’un roulement de tête qui le rendait difficile à frapper au moment opportun en contre-attaque. Il a aussi perçu certains signes qui l’ont amené à croire que son adversaire se sentirait moins à l’aise dans le ring s’il était forcé de reculer.

Entre la première et la deuxième reprise, Bouchard a donc annoncé sans plus attendre à François Duguay qu’il revenait à son style habituel, à savoir avancer et mettre de la pression. Le natif de Baie-Saint-Paul, qui venait de perdre clairement le premier round, a ainsi pu renverser immédiatement la vapeur pour l’emporter par décision unanime (59-55, 59-55, 58-56), et préserver sa fiche immaculée.

Une excellente décision, prise à point nommé dans un court combat de six rounds, qui démontre la capacité à s’adapter de Sébastien Bouchard, de même que la confiance bien méritée que place son entraîneur de longue date dans son jugement.

Performance la plus décevante: Yuriorkis Gamboa (contre Darleys Perez, le 8 juin au Centre Bell)

C’est le réseau HBO qui a décidé de faire boxer Gamboa en demi-finale du gala mettant en vedette Adonis Stevenson et Chad Dawson. À l’annonce de la nouvelle, plusieurs journalistes et observateurs québécois se sont ouvertement réjouis. Le Cubain, en effet, est réputé posséder un talent exceptionnel, et il a raflé une multitude de titres chez les amateurs et les professionnels. On entendait sur plusieurs tribunes que le public allait assister à une magistrale démonstration de boxe de sa part.

Le précédent combat de Gamboa, disputé à la fin de 2012 contre Michael Farenas, aurait toutefois pu donner matière à tempérer les certitudes et l’enthousiasme. Dans cet affrontement, en effet, Gamboa avait paru la plupart du temps plus préoccupé de rouler fièrement les épaules afin d’exhiber sa musculature, que de dominer autant qu’il aurait pu un adversaire qui lui était clairement inférieur. Cette nonchalance avait failli lui jouer un bien mauvais tour au 9e round, lorsque Farenas l’avait sérieusement sonné et envoyé au tapis.

Doit-on imputer aux séquelles de ce knock-down la prudence extrême dont fit preuve le Cubain au cours de son combat à Montréal? Quelle que soit la réponse à cette question, sa soporifique victoire par décision en douze rounds contre Perez restera à jamais gravée comme le moment faible de l’un des galas les plus significatifs de l’histoire récente de la boxe au Québec, ayant consacré l’avènement d’Adonis Stevenson au rang de pugiliste de premier plan.

Boxeur ayant le mieux progressé techniquement: Schiller Hyppolite

Après avoir subi une défaite crève-cœur par décision à la fin de 2012 contre Francy Ntetu, dans un combat extrêmement serré, Hyppolite (8-1-0, 5 K.O.) a bien rebondi en 2013 en décrochant trois victoires avant la limite. Au cours de ces trois combats, il nous a donné à voir des attaques mieux construites, des enchaînements plus fluides, des déplacements rapides et bien calculés, et une meilleure lecture de l’adversaire.

De telles améliorations sont forcément le fruit d’un travail sérieux et bien encadré au gymnase, combiné à la constance et à la discipline qui caractérisent un mode de vie dédié au sport. Alors que s’amorce la nouvelle année, tout semble indiquer que le natif d’Haïti, âge de 27 ans, sera bientôt reconnu par tous les amateurs comme une étoile montante.

Boxeur dont on aimerait avoir des nouvelles: Pier-Olivier Côté

Nous avons tenté de contacter «Apou» il y a une dizaine de jours pour savoir comment il se portait, et s’il se remettait des problèmes de fatigue chronique qui l’ont forcé à l’inactivité depuis la mi-2012. Au moment d’écrire ces lignes, nous n’avions toujours pas reçu de réponse de sa part, peut-être parce qu’il préfère demeurer discret sur sa condition actuelle.

Si tel est le cas, nous allons évidemment respecter son souhait, et n’entendons pas le relancer s’il choisit de ne pas se manifester. Nous lui souhaitons quoi qu’il en soit un rétablissement complet, et un retour à l’entraînement, pour 2014. Son talent était à ce point électrisant que son absence prolongée a créé un vide palpable et toujours ressenti, malgré la grande vitalité du noble art au Québec.

Boxeur dont le style mériterait d’être apprécié par un plus grand nombre d’amateurs: Andy Gardiner

Le natif de Winnipeg est déménagé à Ottawa en 2012 pour entamer sa carrière professionnelle sous la direction d’Éric Bélanger au club Final Round Boxing. Il a depuis récolté neuf de ses dix victoires au Québec et fait officiellement partie depuis quelques semaines de l’écurie d’Eye of the Tiger Management, ce qui l’assure de poursuivre sa carrière principalement chez nous.

Ceux qui ont vu boxer Gardiner savent que, s’il livre toujours des combats enlevants, c’est entre autres parce qu’il est un pur «pressure fighter», aimant bombarder ses adversaires au corps-à-corps. Mais, selon nous, un autre élément fort intéressant de son style réside dans le fait qu’il tend à pratiquer, en défensive, la technique du «bob and weave».

Qu’est-ce que le «bob and weave»? Il s’agit en réalité de la combinaison de deux techniques distinctes, le «bob» et le «weave». Le «bob» est une inclinaison du tronc vers l’avant, comme lorsqu’on s’incline vers quelqu’un en signe de salutation ou de respect, suivie d’une remontée. Le «weave» est aussi une inclinaison du tronc, mais vers la droite ou la gauche (pensez au mouvement d’un essuie-glace). Lorsqu’on arrive à mélanger constamment les deux de façon imprévisible, il en résulte un mouvement constant de la tête, qui devient une cible extrêmement difficile à atteindre.

Les historiens du noble art connaissent la grande efficacité de cette technique, puisqu’elle formait la base du style de quelques-uns des plus grands boxeurs du passé, par exemple, Jack Dempsey, Henry Armstrong et Joe Frazier. Elle s’avère idéale pour les combattants qui préfèrent lancer des crochets et se battre à courte distance, car elle leur permet de s’approcher de l’adversaire en évitant les coups, et particulièrement les coups longs comme le jab. On trouvera une démonstration extrêmement claire, et très impressionnante, des résultats que peut produire cette technique dans la première minute de cette vidéo, mettant en vedette Joe Frazier lors de son premier combat contre Muhammad Ali.

Étant donné les attributs athlétiques de Gardiner, sa progression chez les professionnels dépendra à notre avis de la mesure dans laquelle il arrivera à parfaire sa maîtrise du «bob and weave». Plus sa défensive deviendra solide, et plus il deviendra possible pour lui d’utiliser avec efficacité ses indéniables qualités offensives contre des adversaires de valeur, incluant peut-être des boxeurs classés mondialement. Nous sommes donc particulièrement curieux de voir comment se poursuivra son développement dans les mois et les années à venir.

Comme on sait, la scène des mi-lourds est déjà très riche au Québec. Verrons-nous bientôt les amateurs mentionner le nom de Gardiner dans le même souffle que ceux d’Adonis Stevenson, de Jean Pascal, de Lucian Bute, d’Eleider Alvarez ou d’Artur Beterbiev? La chose n’a rien d’impossible selon nous.

1 Comment

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    hend0345 janvier 04, 2014

    Artur Beterbiev est un tres bon boxeur

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