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]]>Le Québécois réussit à envoyer «The Executioner» au tapis une première fois au 1er round, puis une seconde fois au 3e, mais, dans les deux derniers tiers de l’affrontement, il parut par moments dépassé par la boxe extrêmement fine et subtile de son adversaire, et notamment par la grande qualité de ses déplacements, un aspect par rapport auquel le Haïtien d’origine a plutôt l’habitude d’avoir l’avantage.
Quoi qu’on puisse penser du verdict rendu par les juges dans ce combat, il faut reconnaître que Pascal a su y faire subir deux knockdowns au génie défensif qu’est Hopkins, lui qui en 22 ans de carrière n’était précédemment allé que deux fois au plancher, les deux fois dans un combat tenu 16 ans plus tôt contre Segundo Mercado.
Texte de Martin Achard
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]]>Par Martin Achard
La liste des immortels du noble art qui ont déjà livré un ou des combats au Québec est plus riche qu’on ne le soupçonne communément. Voici quelques-uns des plus grands boxeurs à s’être battu dans un ring québécois. Préparez-vous à être impressionnés, car ce top 5 est si relevé qu’il pourrait presque passer pour un classement des cinq plus grands pugilistes de l’histoire, point à la ligne!
1. Sugar Ray Robinson (5 mai 1963)
Il s’agit d’un fait trop peu connu, mais oui, Sugar Ray Robinson a déjà boxé au Québec. Deux raisons expliquent pourquoi son passage chez nous n’eut qu’un faible retentissement et n’a laissé que peu de traces dans la mémoire collective. D’une part, le quintuple champion des poids moyens n’était plus, en 1963, qu’un boxeur sur le retour, âgé de 42 ans. D’autre part, il ne se battit ni à Montréal ni à Québec, mais plutôt à Sherbrooke, devant une maigre foule de 2800 personnes, soit un nombre très en deçà des 6000 ou 7000 qui avaient été espérées par les organisateurs de l’évènement.
Malgré ses habiletés déclinantes, «Sugar» n’eut aucune difficulté à se débarrasser de l’obscur adversaire qui lui avait été déniché pour l’occasion, un pugiliste algérien du nom de Maurice Roblet (ou Rolbnet, à en croire certaines sources). Au premier round, Robinson s’employa à parer les charges énergiques de son rival; puis, au deuxième, il l’ébranla d’une série de coups; et, au troisième, après l’avoir atteint à répétition, il le mit complètement K.-O. d’une puissante droite.
Fait digne de mention: le duel Robinson-Robnet fut arbitré par nul autre que Joe Louis, qui agissait également à titre de co-promoteur de l’évènement! Les spectateurs présents à l’Aréna de Sherbrooke purent donc se vanter, jusqu’à la fin de leurs jours, d’avoir vu se côtoyer dans un même ring deux légendes absolues du noble art.
2. Willie Pep (25 octobre 1944 et 21 juillet 1965)
Le Québec eut l’honneur d’accueillir deux fois en son sol Willie Pep. Sa première prestation chez nous, le 25 octobre 1944, n’est pas sans importance sur le plan historique, puisqu’elle marqua la première fois que «Will o’ the Wisp» se battait à l’extérieur des États-Unis. Par ailleurs, elle permit au public québécois de voir le grand champion au sommet de son art, lui qui n’était alors âgé que de 22 ans et détenteur de la couronne mondiale des poids plumes.
Devant environ 4000 personnes réunies au Forum de Montréal, Pep donna une magistrale démonstration de boxe intelligente et technique, et remporta une décision unanime en dix rounds (9-1, 8-0-2 et 8-2) contre le journeyman Jackie Leamus, dans un duel où son titre n’était pas en jeu. Comme il arrive cependant quelquefois lorsqu’un maître de la défensive est en action, certains membres du public n’apprécièrent pas le spectacle offert et manifestèrent, à partir de la mi-combat, leur mécontentement par des huées. De façon plus étonnante, ce manque d’appréciation de la virtuosité de Pep se constata également chez l’un des commissaires de la Commission athlétique de Montréal, qui demanda à l’arbitre, entre deux rounds, de réclamer plus d’agressivité de la part des deux boxeurs!
Après ce duel, 21 années s’écoulèrent avant que les amateurs du Québec pussent revoir Pep à l’œuvre chez eux. Le 21 juillet 1965, celui qui avait définitivement perdu son titre mondial 14 ans plus tôt monta dans le ring du Vieux Colisée de Québec pour y affronter le modeste Benny Red Randall. Dans l’une des toutes dernières sorties de son illustre carrière, riche de plus de 240 combats, le natif du Connecticut n’eut aucune difficulté à envoyer son rival au plancher au premier round et à se mériter, à l’unanimité des juges, une victoire par décision en dix rounds.
3. Sam Langford (19 avril 1915 et 29 décembre 1916)
Malheureusement, le premier passage au Québec de Sam Langford, le «plus grand boxeur de l’histoire à n’avoir jamais détenu de titre mondial», fut un immense fiasco. En effet, le 19 avril 1915 au Théâtre Royal de Montréal, le Bostonnais d’origine canadienne et son adversaire, Porky Dan Flynn, décidèrent de faire équipe dans le ring afin de se fatiguer ou de souffrir le moins possible! Devant un public de quelques centaines de personnes d’abord stupéfait, puis scandalisé, les deux poids lourds ménagèrent à outrance leurs énergies et s’appliquèrent, avec une constance sans faille, à ne mettre aucune puissance dans leurs frappes. La situation devint si ridicule que, au huitième round, l’arbitre Pat Rooney préféra mettre un terme à l’«affrontement» et déclarer un no contest.
Il n’en fallait évidemment pas plus pour que, dans les jours suivants, plusieurs observateurs exigent la création d’une commission pour réguler et superviser la boxe à Montréal, établie sur le modèle de celle qui existait déjà à New York. Et quelle fut, au vu des informations dont nous disposons, la cause probable du simulacre de combat offert par Langford et Flynn? Bien simple: les deux boxeurs avaient été payés en entier avant le son de la cloche, de sorte qu’ils n’avaient pas à craindre, d’un point de vue financier, les conséquences d’un manque de combativité dans l’arène…
Langford tenta peut-être de se faire pardonner l’année suivante, le 29 décembre 1916, lorsqu’il affronta Bob Devere au Jardin de danse, une défunte salle de la métropole située rue de Bleury, à quelques pas de Ste-Catherine. Il entama l’affrontement avec hargne et passa près d’achever son rival à la deuxième reprise grâce à de solides directs de la gauche, mais il accusa quelque peu, dans la suite du combat, le poids de ses 33 ans, ce qui permit à Devere de revenir en force dans les huitième, neuvième et dixième assauts. Au final, Langford remporta le «newspaper decision», mais sa victoire manqua de panache et ne fut pas considérée comme décisive.
En somme, le «Boston Tar Baby» ne donna jamais, en deux présences à Montréal, l’occasion au public québécois d’admirer l’étendue de son talent, lui qui, dans les anciens films de combats qui nous sont parvenus, apparaît comme le boxeur le plus doué et le plus redoutable des deux premières décennies du 20e siècle, et ce, autant sur le plan technique que sur celui de la force de frappe.
4. Harry Greb (6 avril 1921)
Harry Greb était une pure merveille de la nature, l’incarnation même du «pressure fighter» toujours en mouvement et possédant une énergie infinie. Le 6 avril 1921, au Mount Royal Arena, le futur champion mondial des poids moyens fut fidèle à lui-même et éblouit par ses habiletés pugilistiques la foule de 2500 amateurs montréalais venue l’observer, en remportant pratiquement tous les dix rounds de son combat contre Jack Renault (alias Léo Dumoulin), en débit du fait qu’il concédait une bonne quinzaine de livres à son rival québécois.
«The Pittsburgh Windmill», alors âgé de 26 ans, lança une pluie ininterrompue de coups rapides et il utilisa sa science de boxe pour dominer à toutes les distances, y compris au corps-à-corps, où il impressionna par sa capacité à rudoyer Renault, qui était pourtant un pugiliste tout à fait compétent.
Le résultat fut un «newpaper decision» clair et unanime, accompagné d’éloges dithyrambiques, en faveur de celui qui disputa un nombre ahurissant de 327 combats professionnels en carrière et qui arriva au passage à défaire (à une époque où il n’y avait que huit catégories de poids et un seul véritable champion par catégorie) pas moins de treize boxeurs ayant déjà détenu un titre mondial, des poids moyens aux poids lourds!
5. Roberto Duran (20 juin 1980)
Le lien qui existe entre Roberto Duran et le Québec est particulier et ne se compare à rien d’autre dans le présent classement. En effet, si «Manos de Piedra» n’avait jamais affronté Sugar Ray Leonard au Stade Olympique, il occuperait une place nettement moins élevée dans les classements «livre pour livre» des meilleurs pugilistes de l’histoire, où il est fréquent, à l’heure actuelle, de le voir percer le top 10. Autrement dit, c’est à Montréal que Duran est véritablement devenu Duran, et qu’il s’est mérité le statut de super légende, soit de boxeur capable de réaliser de grands prodiges dans un ring. Et à juste titre. Car quoi de plus prodigieux que d’arriver à vaincre un adversaire suprêmement talentueux, qui est à la fois plus jeune, plus grand, plus imposant physiquement et plus rapide que soi? C’est exactement ce que, le 20 juin 1980, le Panaméen parvint à accomplir, en se méritant, au terme d’une guerre de quinze rounds d’une rare intensité, une décision certes serrée (146-144, 148-147 et 145-144), mais pleinement méritée, contre Leonard.
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]]>Il y a 91 ans aujourd’hui, le 16 juillet 1926, Jack Delaney (alias Ovila Chapdelaine) devenait champion du monde des mi-lourds en battant son grand rival Paul Berlenbach, à l’occasion de l’un des combats les plus courus et les plus médiatisés de la décennie 1920.
Outre le charisme personnel considérable de Delaney, des raisons précises expliquent l’engouement extrême – et aujourd’hui largement oublié – que suscita aux États-Unis et à travers le monde le duel entre le Québécois de naissance et le New-Yorkais. Tout d’abord, il s’agissait du troisième affrontement entre les deux pugilistes, qui revendiquaient alors chacun une victoire sur l’autre. Un peu plus de deux ans auparavant, en effet, dans un combat entre aspirants au titre, Delaney avait impressionné en passant un spectaculaire T.K.-O. au solide Berlenbach dès le quatrième round, lui infligeant ainsi sa première défaite en carrière.
Puis, après la conquête du titre par Berlenbach contre Mike McTigue, les deux s’étaient affrontés à nouveau au mois de décembre 1925, cette fois avec la couronne mondiale en jeu. Au cours des premiers rounds de ce second duel, Delaney était passé à un cheveu de répéter son exploit de l’année précédente, en envoyant Berlenbach au tapis et en le sonnant à plusieurs reprises, mais le champion en titre, un homme d’une détermination exceptionnelle, avait su traverser la tempête et terminer en force, pour se mériter une décision en quinze rounds. Après ces deux premiers combats, riches en action et en surprises, le public de l’époque salivait donc à l’idée de revoir «Bright Eyes» et «The Astoria Assassin» en découdre.
Par ailleurs, l’affrontement Delaney-Berlenbach avait comme attraits non négligeables d’opposer les deux plus lourds cogneurs de la division, et d’offrir un intéressant contraste de styles entre la boxe techniquement raffinée du Québécois et l’approche tout en muscles de Berlenbach, un ancien champion de lutte amateur qui ne s’était converti que sur le tard au noble art.
Quel niveau d’intérêt pouvait atteindre dans les années 1920, l’un des âges d’or de la boxe, un tel duel, que les médias décrivaient alors comme le plus gros combat de l’histoire de la division des mi-lourds? Jugez-en par vous-mêmes à partir de la description plus bas, qui fera regretter à tout amateur actuel de n’avoir pu vivre une telle excitation et une telle effervescence!
La pesée
Même s’il eut lieu le 16, le combat Delaney-Berlenbach était originellement prévu pour le 15 juillet, et conformément aux pratiques de l’époque, la pesée officielle se déroula le 15 à 14h, soit deux ou trois heures à peine avant l’heure planifiée pour le début des hostilités. Elle fut tenue sur l’île de Manhattan dans les bureaux de la commission athlétique de l’état de New York, qui étaient alors situés dans le prestigieux Flatiron Building, un trésor de l’architecture moderne. Signe de l’importance du combat: au moment de la pesée, pas moins de 5000 curieux se massèrent autour de l’édifice et bloquèrent complètement la Cinquième Avenue et Broadway!
La veille, tant Delaney que Berlenbach s’était publiquement déclaré confiant de l’emporter par K.-O., mais lorsque les deux rivaux se croisèrent dans les bureaux de la commission athlétique, ils se saluèrent avec la plus grande cordialité et ne laissèrent transparaître entre eux aucune animosité. Le champion fit d’abord osciller la balance à 174 livres et quart, puis Delaney – qui était arrivé avec 15 minutes de retard – suscita des murmures parmi les observateurs présents en affichant un poids de 166 livres et demie, bien en deçà des 172 ou 173 livres qu’avaient prédits les analystes.
Nous ignorons si, après la pesée, les deux boxeurs éprouvèrent de la difficulté à quitter l’édifice pris d’assaut par la foule et à traverser le Brooklyn Bridge pour rejoindre le lieu de leur affrontement, situé à dix kilomètres de distance. Toujours est-il que les fortes pluies qui tombaient cette journée-là sur The Big Apple forcèrent, peu après 17 heures, le report du combat à la journée suivante. Puisque les règlements de la commission athlétique de l’état de New York prévoyaient que, en cas de report de seulement 24 heures, les deux boxeurs n’avaient pas à effectuer une seconde pesée, la décision de remettre le combat au lendemain fit subitement passer le statut de Delaney de favori à négligé chez les parieurs. Plusieurs firent en effet le pari que le délai d’une journée permettrait à Berlenbach de complètement se réhydrater et de jouir, au moment du combat, d’un avantage de masse et de force trop marqué pour «Bright Eyes».
Le combat
C’est dès 8 heures du matin que, le lendemain, les spectateurs commencèrent à affluer au Ebbets Field, le célèbre domicile des Dodgers de Brooklyn, aujourd’hui démoli, et lieu du duel. Pas moins de 41000 spectateurs convergèrent vers le stade en métro, en autobus, en tramway, en taxi ou à bord de leur véhicule personnel, ce qui força les autorités à déployer un impressionnant dispositif de sécurité composé de 500 policiers, dont 200 eurent le privilège de patrouiller l’intérieur du stade et donc d’assister à l’évènement.
Cinq catégories de billets avaient été mises en vente pour le gala, à des prix de 3,30$, 7,70$, 11$, 16,50$ et 27,50$. Pratiquement tous les spectateurs situés dans les sièges les plus éloignés du ring – qui avait été spécialement placé pour l’occasion entre le monticule du lanceur et le deuxième but, de façon à assurer la meilleure vue possible à tous – arrivèrent équipés de jumelles.
Dans les loges pour dignitaires et les sièges à 27,50$ prirent place plusieurs personnes d’importance et célébrités, incluant le maire de New York, James Walker, et nul autre que l’athlète le plus populaire des années 1920, le «Bambino» Babe Ruth, qui déclara aux journalistes: «Je prédis une victoire de Berlenbach. Nous les gros cogneurs devons faire preuve de solidarité!». Il était alors clair aux yeux de tous ceux présents à l’intérieur du Ebbets Field que l’affrontement Delaney-Berlenbach constituait, pour reprendre la phrase du célèbre journaliste James P. Dawson du New York Times, «le plus gros évènement de boxe depuis le combat entre Jack Dempsey et Luis Angel Firpo tenu trois ans plus tôt»!
Le natif de Saint-François-du-Lac fut le premier à effectuer son entrée dans le ring, vêtu d’une robe de couleur violette. Le champion le suivit de quelques secondes à peine, enveloppé dans une robe aux couleurs de l’arc-en-ciel et portant une serviette sur la tête. Au son de la cloche, Delaney se mit à appliquer à la lettre la stratégie qui avait été révélée au public quelques jours auparavant par son gérant Pete Reilly, et qui consistait à frapper Berlenbach avec force si l’occasion se présentait, mais à ne pas chercher le K.-O. à tout prix. Le clan Delaney était en effet confiant de voir leur boxeur remporter une bonne majorité des quinze rounds si le combat se rendait à la limite, une approche stratégique qui explique sans doute pourquoi «Bright Eyes» se présenta dans le ring à 167 livres environ, c’est-à-dire à un poids inférieur d’une quinzaine de livres à celui de Berlenbach réhydraté, mais qui favorisait l’endurance cardio-vasculaire.
Delaney prit le contrôle de l’affrontement dès les six premières minutes grâce à sa rapidité, sa précision, son plus vaste arsenal de frappes et ses déplacements supérieurs. Il ébranla Berlenbach avec une droite à la mâchoire au premier round et le malmena à nouveau au deuxième en plaçant une magnifique salve des deux mains. Le Québécois se blessa cependant au pouce gauche lors de cette seconde reprise, mais ce fait ne lui enleva pas l’usage de sa main avant. Au cinquième, un crochet de gauche fit même chuter Berlenbach, mais l’indomptable champion se releva immédiatement, et il continua à foncer comme un taureau et à placer avec régularité sa gauche au corps.
«The Astoria Assassin» connut ses meilleurs moments au neuvième et au dixième, deux rounds au cours desquels il donna l’impression de pouvoir renverser la vapeur. Mais Delaney se ressaisit avec brio dans le dernier tiers du combat. Au onzième, il ouvrit une coupure au-dessus de l’œil gauche du champion grâce à un bel uppercut de la droite, et au douzième, il l’ébranla sérieusement grâce à plusieurs coups de puissance délivrés en fin de round. Les trois dernières reprises virent le Québécois utiliser son jeu de jambes pour se déplacer en cercle autour de son rival et placer des frappes précises, incluant une puissante droite au quatorzième qui passa bien près de produire un second knock-down.
Au terme de sa magistrale performance, Delaney fut récompensé d’une victoire par décision unanime, rendue par l’arbitre Jim Crowley et les juges Charles F. Mathison et Tom Flynn. L’annonce du verdict déclencha une explosion de joie chez plusieurs spectateurs, qui projetèrent des chapeaux, des programmes et des journaux dans les airs. La liesse se manifesta de façon particulièrement intense chez les «Delaney’s screaming mamies», soit chez le groupe d’admiratrices qui, à l’époque, courait tous les combats de «Bright Eyes», et qui appréciait autant la belle apparence que les talents pugilistiques de ce dernier.
«Je suis extrêmement heureux d’être le champion des mi-lourds», déclara le nouveau monarque à sa sortie du ring. «Ce fut un combat difficile, mais après le douzième round, je savais que j’avais une bonne avance et que la victoire m’appartenait. Je tiens toutefois à rendre hommage à Berlenbach, qui est un exemple de courage et qui possède la gauche la plus puissante avec laquelle on m’ait jamais frappé. J’ai tenté de placer une droite qui aurait mis fin au combat, mais Paul a tout encaissé et il est resté debout. Je vais maintenant me reposer pendant un mois environ, puis planifier ma première défense de titre».
Cette première défense eut lieu cinq mois plus tard, contre le Jamaica Kid, et elle fut suivie d’un quatrième affrontement contre Berlenbach en 1927, mais il s’agit d’autres chapitres de la glorieuse carrière de Delaney, sur lesquels il me faudra revenir dans un autre article.
Sources
James P. Dawson, «Berlenbach Bout Drawing Big Gate», The New York Times, 11 juillet 1926.
Auteur inconnu, «Berlenbach Ends Hard Work Today», The New York Times, 13 juillet 1926.
Auteur inconnu, «Delaney Suspends Intensive Training», The New York Times, 14 juillet 1926.
Auteur inconnu, «Will Win by a Knockout Is Assertion of Both the Champion and Challenger», The New York Times, 15 juillet 1926.
Auteur inconnu, «Berlenbach Risks His Title Tonight», The New York Times, 15 juillet 1926.
Frank Getti, «Light-Heavyweight Crown to Change Heads Tonight The “Wise Ones” Predict», The Evening Independent, 15 juillet 1926.
Auteur inconnu, «Fight Rained Out; To Be Held Tonight », The New York Times, 16 juillet 1926.
James P. Dawson, «Delaney Superior in 12 of 15 Rounds», The New York Times, 17 juillet 1926.
Auteur inconnu, «Jack Delaney Wins Berlenbach’s Title in Thrilling Fight», The New York Times, 17 juillet 1926.
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]]>Cet article Marcel Cerdan : Les éléments de son style est apparu en premier sur Boxe québécoise pour tous les amateurs francophones – 12rounds.ca.
]]>L’ancien champion du monde des poids moyens Marcel Cerdan n’est pas seulement un héros national français, mais aussi un pugiliste extrêmement spectaculaire qui avait su combiner en une magistrale synthèse quantité d’habiletés offensives et défensives de haut niveau.
Dans le présent film documentaire, Martin Achard propose une analyse des éléments-clés du style de boxe pratiqué par le légendaire «Bombardier marocain». Les nombreux extraits vidéos proposés vous révéleront toute la beauté de la boxe de Cerdan, tout en vous dévoilant d’intéressants parallèles entre sa «méthode» dans le ring et celle de deux disciples de l’entraîneur Cus D’amato: les anciens champions du monde des poids lourds Floyd Patterson et Mike Tyson.
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]]>Cet article Il y a 19 ans, Stéphane Ouellet démolissait Alex Hilton en 3 rounds est apparu en premier sur Boxe québécoise pour tous les amateurs francophones – 12rounds.ca.
]]>Il y a 19 ans aujourd’hui, le 3 avril 1998, Stéphane Ouellet (24-1-0, 16 K.-O.) signait l’une de ses victoires les plus convaincantes en carrière en mettant T.K.-O. Alex Hilton (33-4-0, 22 K.-O.) au troisième round, dans la finale d’un gala présenté au Centre Molson.
Le «Poète» avait totalement dominé l’affrontement, le second à être disputé entre les deux hommes. Il s’était imposé grâce à son jab dès la première reprise, avait touché la cible avec de solides combinaisons dès la deuxième, puis avait envoyé Alex au tapis d’une combinaison gauche-droite à la troisième, avant de le malmener dans les câbles et de forcer l’arbitre Tony Crivello à mettre un terme au massacre, au même moment où Dave Hilton Sr se précipitait dans le ring pour secourir son fils et protégé.
«Il a la classe d’un deuxième aspirant mondial», avait humblement concédé Alex après sa défaite. «Il est rapide, il se déplace bien, il a de bonnes mains». Le gérant de Ouellet, Yvon Michel, avait pour sa part renchéri sur les propos du vaincu en affirmant: «si Stéphane demeure dans les mêmes dispositions que pour ce combat, je ne vois pas de boxeur au monde capable de le battre. Ni Keith Holmes ni Otis Grant». Quant au Saguenéen, qui s’était approprié le titre canadien vacant des poids moyens par son triomphe, il déclara avec conviction: «j’en ai fini avec les Hilton, on passe à autre chose!». En prononçant ces paroles, il ne pouvait semble-t-il se douter qu’au cours des deux années et demie suivantes, il allait en fait en avoir plein les bras avec le frère aîné d’Alex, Dave Jr, contre qui il allait livrer trois combats qui furent particulièrement éprouvants pour lui, autant sur le plan physique que sur le plan émotionnel.
Signalons en terminant un fait d’importance: le gala Stéphane Ouellet-Alex Hilton 2, qui attira une foule fort respectable de 11582 amateurs, fut le tout premier programme organisé par un groupe dont le nom allait devenir bien connu dans l’univers du sport au Québec, à savoir InterBox. La nouvelle firme de promotion, qui était alors financée par Hans-Karl Muehlegg, mit bien entendu le paquet pour cet événement inaugural, entre autres en invitant à Montréal des légendes du ring comme Archie Moore, Yvon Durelle, Jake LaMotta et Beau Jack.
Parmi les spectateurs présents le soir du gala, on put entre autres remarquer l’ancien premier ministre du Canada Brian Mulroney, plusieurs personnalités artistiques ou médiatiques comme Patrick Huard et Julie Snyder, et même — signe d’une époque particulièrement mouvementée dans l’histoire du Québec — quelques membres du groupe de motards les «Rockers».
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]]>Cet article Qu’est-ce qu’un maître boxeur? L’exemple de Benny Leonard est apparu en premier sur Boxe québécoise pour tous les amateurs francophones – 12rounds.ca.
]]>Je me propose dans le présent article de faire ressortir certains éléments-clés de la boxe pratiquée par Benny Leonard, le champion des poids légers de 1917 à 1925. Pourquoi avoir choisi un tel sujet d’article? Quel en est l’intérêt? Et quels arguments préalables puis-je invoquer pour inciter un lecteur à visionner des extraits, flous et saccadés, d’un combat presque centenaire, mettant en vedette des pugilistes complètement oubliés aujourd’hui?
Répondre de façon exhaustive à ces questions exigerait plusieurs pages de développements, et alourdirait par conséquent l’introduction d’un article que je désire aussi court et facile à lire que possible. Je me permettrai donc, en guise de prologue, d’invoquer un argument d’autorité, puis d’en tirer une conséquence, dont le contenu exact et les ramifications deviendront plus clairs non pas seulement dans les développements qui suivent, mais dans d’autres écrits que je ferai paraître bientôt.
L’argument d’autorité est le suivant. Dans les classements contenus dans le livre bien connu de Teddy Atlas et de Bert Sugar, The Ultimate Book of Boxing Lists, Leonard pointe, toutes catégories de poids confondues, et pour l’ensemble de l’histoire, à la toute première place des boxeurs les plus intelligents, à la deuxième place des meilleurs «ring generals» (derrière nul autre que Sugar Ray Robinson), et à la deuxième place des meilleurs techniciens (encore une fois derrière Sugar Ray Robinson)!
Quelle conséquence découle de ce fait? Elle est simple: Leonard fournit un exemple privilégié, peut-être le meilleur qui soit, pour mieux comprendre certaines vérités fondamentales concernant la nature de la boxe comme sport, les styles de boxe, et les qualités et caractéristiques des «maîtres boxeurs», par quoi j’entends les rares pugilistes dont la science de boxe mérite d’être qualifiée de «totale».
Les deux sens du mot «intelligence» en boxe
Je prendrai, comme base et fil conducteur de mon analyse, la qualité dont Leonard était le plus fier, et dont le caractère sans pareil est reconnu à juste titre par Atlas et Sugar: son incroyable intelligence de la boxe. Mais que veut-on dire, en matière de noble art, par «intelligence»? Essentiellement deux choses.
Le mot renvoie, premièrement, à la connaissance des stratégies et des manœuvres utilisables dans un ring, un point auquel Leonard accordait une importance extrême. Nous savons en effet que le «Ghetto Wizard» (dont un autre surnom était «The Great») passait en moyenne huit heures par jour au gymnase, période au cours de laquelle, en plus de s’entraîner physiquement, il scrutait les autres boxeurs et leur prodiguait des conseils. Sa soif d’apprendre était telle que, même dans ses années de maturité, il continuait à regarder avec une attention religieuse des séances de sparring entre novices, une occupation qui suscita un jour une expression de surprise de la part de l’entraîneur Ray Arcel. L’explication que lui offrit Leonard fut laconique, mais claire: «il est impossible de prédire le moment où l’un de ces jeunes fera accidentellement quelque chose que je pourrai utiliser dans le ring»[i]! Et que valaient les conseils de Leonard aux autres pugilistes? Qu’on en juge par cette anecdote. Alors que le futur champion du monde des poids lourds Gene Tunney se préparait pour son combat revanche contre Harry Greb, qui lui avait servi une correction quelques mois plus tôt, Leonard lui recommanda de frapper Greb au cœur chaque fois que ce dernier allongeait le bras gauche, afin de lui saper son énergie. La tactique porta fruit et permit à Tunney de venger sa seule défaite en carrière.
Mais l’intelligence en boxe ne se résume pas à cet aspect, axé sur la connaissance pure. Pour qu’un boxeur soit dit «intelligent», encore faut-il qu’il soit capable, en situation de combat réel, de mettre concrètement et constamment en œuvre ses connaissances techniques et stratégiques, en plus de faire preuve d’adaptabilité et d’opportunisme face à des adversaires redoutables, bien préparés et rusés. Leonard en était tellement conscient qu’il avait donné à cette dimension de l’intelligence pugilistique un nom: l’«énergie mentale»[ii]. Et il lui arrivait souvent, avant ses combats, de prédire sa victoire en faisant valoir qu’il possédait plus d’«énergie mentale» que ses adversaires. Une telle affirmation pourra paraître curieuse pour les amateurs d’aujourd’hui, habitués à entendre les combattants vanter, par exemple, leur «vitesse», leur «force de frappe» ou leur «expérience», mais la réalité que cherchait à souligner Leonard par cette expression ne devrait, quant à elle, pas surprendre, puisque trois boxeurs nous ont offert, au cours des dernières années, quantité d’exemples marquants de l’importance déterminante que peut revêtir une «énergie mentale» supérieure dans le ring, à savoir Bernard Hopkins, Floyd Mayweather Jr et Andre Ward.
En cherchant ainsi à cultiver et à privilégier par-dessus tout l’intelligence pugilistique, Leonard poursuivait un but clair: être en mesure de dominer toutes les facettes d’un combat, ce qui m’amène directement à mon prochain point.
Remporter la bataille du positionnement dans le ring
L’une des meilleures façons de dominer un combat est, bien entendu, d’en dicter l’allure, et la meilleure façon d’en dicter l’allure consiste à remporter la bataille du positionnement dans le ring. Par conséquent, le socle même de la boxe pratiquée par Leonard, la base sur laquelle se déployait toute sa maestria technique et stratégique, résidait dans un jeu de jambes excellentissime. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder n’importe quelles séquences de quelques dizaines de secondes du combat d’où je tirerai dans la suite tous mes exemples, soit le premier duel entre Leonard et Lew Tendler, disputé le 27 juillet 1922 à Jersey City au New Jersey[iii]. On notera au passage que Tendler était lui-même un boxeur de grande élite, qui fut considéré pendant longtemps, et est encore considéré par certains, comme l’un des meilleurs gauchers de l’histoire. Voici la version la plus complète qui existe du duel, dans lequel Leonard défendit avec succès sa couronne des poids légers en remportant un «newspaper decision».
Les extraits visionnés au hasard montreront à l’évidence que Leonard maîtrisait à la perfection toutes les subtilités du jeu de jambes, entendu dans le sens défini dans le remarquable ouvrage de 1928, Boxing, de l’ancien champion mondial des mi-lourds Philadelphia Jack O’Brien, c’est-à-dire comme une activité «dont le but n’est pas de faire étalage de souplesse et d’habileté en tant que danseur, mais plutôt de se déplacer rapidement et efficacement au moment opportun afin d’obtenir un avantage défensif ou offensif sur l’adversaire». On sera particulièrement frappé, en admirant Leonard se mouvoir, par sa capacité à demeurer presque toujours en parfait équilibre, donc prêt à décocher instantanément des coups de qualité. C’est d’ailleurs l’un des points sur lesquels il l’emporte le plus manifestement sur Tendler, qui en tant que combattant avait une approche et des qualités à certains égards semblables aux siennes, mais qui se retrouvait plus fréquemment en déséquilibre.
L’une des conditions essentielles d’une boxe fondée sur le jeu de jambes est évidemment la suivante: posséder une endurance cardiovasculaire et une endurance musculaire au niveau des jambes absolument sans faille. On pourra ouvrir à nouveau la vidéo plus haut et aller directement aux 11e et 12e rounds, les deux derniers de l’affrontement, pour constater que Leonard possédait également au plus haut point ces qualités. S’il en est ainsi, c’est évidemment parce qu’il leur accordait une importance cruciale dans son entraînement, beaucoup plus grande, manifestement, que celle qu’il accordait au développement d’une musculature proéminente au niveau des bras et des épaules (une préoccupation qui, si elle s’était avérée trop grande chez lui, aurait probablement interféré de manière néfaste avec d’autres composantes de son entraînement).
Faire reposer sa boxe sur un jeu de jambes excellentissime confère par ailleurs immédiatement un énorme avantage, à savoir la possession de la meilleure défensive qui soit, et ce, à un double titre. Je cite de nouveau Philadelphia Jack O’Brien, qui explique ce point avec concision: «Plus un boxeur développera son jeu de jambes, moins il utilisera ses bras pour se protéger. Grâce à des esquives et à des pas de côté bien exécutés et opportuns, il pourra 1) éviter presque tous les coups et 2) conserver l’usage de ses deux bras pour contre-attaquer», car «un jeu de jambes intelligent», précise O’Brien, «permettra d’éviter les coups de l’adversaire tout en demeurant à portée pour l’atteindre». En rapport avec ces explications, voici trois extraits particulièrement intéressants. Dans le premier, Leonard, après avoir lancé une droite et une gauche, se protège si brillamment de deux charges de Tendler que, même s’il n’effectue aucune contre-attaque, il donne néanmoins l’impression de remporter la séquence. Dans le second, alors que Tendler le menace avec sa main avant, il effectue pour se protéger un très léger pas de côté vers sa droite et profite de l’ouverture ainsi créée pour toucher la cible avec une solide main arrière. Enfin, dans le troisième, il utilise, d’une façon qui rappelle un jeune Muhammad Ali, des pas courts et précis pour frapper Tendler avec des coups longs tout en se mettant immédiatement hors d’atteinte de contre-attaques.
Remporter la bataille du positionnement dans le ring implique aussi la condition suivante: ne jamais se faire emprisonner dans les câbles ou dans un coin. Je cite encore une fois quelques lignes du livre de Philadelphia Jack O’Brien, car elles donnent l’impression d’avoir été écrites pour décrire spécifiquement l’approche de Leonard sur ce point. «Quand le boxeur qui s’est fait acculer dans les câbles ou dans un coin est prêt, il effectue une manœuvre preste et retrouve ainsi sa liberté. (…) Il n’existe pas de règles absolues quant aux méthodes pour se sortir d’un coin. (…) Diversifiez vos manières, car si vous ne maîtrisez qu’une seule façon, votre adversaire s’en apercevra rapidement et il en profitera pour lancer un coup puissant et bien placé, au moment exact où vous effectuerez votre manœuvre». Dans la dernière phrase en particulier, O’Brien touche à un aspect essentiel, qui caractérise plusieurs dimensions de la boxe de Leonard, et sur lequel j’aurai l’occasion de revenir dans un instant: son imprévisibilité. À preuve, ces quatre séquences, dans lesquelles il varie admirablement les façons de s’échapper des câbles ou d’un coin.
Exceller dans le combat à toutes les distances
Cependant, même le boxeur doté du meilleur jeu de jambes pourra devoir se mesurer à un adversaire qui saura lui imposer sa façon de se battre et menacera ainsi de dicter l’allure du combat. Concrètement, cette menace prend souvent la forme suivante: être obligé de se battre à de plus courtes distances alors qu’on souhaiterait se battre à de plus longues[iv], ou vice versa. Par conséquent, un boxeur qui, comme Leonard, se fait un point d’honneur de posséder tous les outils pour conserver – autant que possible et peu importe le type de circonstances auquel il est confronté dans le ring – la maîtrise du combat, devra être capable de se battre avec brio à toutes les distances.
À cette raison, de nature pour ainsi dire «réactive» d’exceller à toutes les distances, s’ajoute une raison de nature «pro-active». En effet, indépendamment de la nécessité de pouvoir bien répliquer aux manœuvres réalisées avec succès par un adversaire, posséder une excellente boxe de loin comme de près donne la capacité à un pugiliste de faire varier, de son propre chef, les endroits d’où il pourra attaquer avec efficace son rival. Inutile de dire que cette capacité, de par les options stratégiques et l’imprévisibilité qu’elle rend possibles, avait absolument tout pour séduire un combattant aussi cérébral que Leonard!
Mais comment arriver à exceller dans le combat à toutes les distances, un niveau de boxe que bien peu de pugilistes atteignent? Pour introduire la réponse à cette question, je ferai mention d’un débat ayant fait rage dans les années 1910, soit à l’époque où Leonard entamait sa carrière professionnelle. Ce désaccord opposait les tenants de l’«outfighting» (principalement des boxeurs britanniques), qui estimaient qu’il était nettement plus profitable de se battre à de plus longues distances, aux tenants de l’«infighting» (avant tout des boxeurs américains), qui considéraient qu’il était grandement préférable de se battre à de plus courtes. En bref, le contentieux se résumait à la question suivante: la boxe est-elle l’art du combat de loin, ou l’art du combat de proche? La réponse qui s’imposa rapidement (entre autres grâce aux écrits du grand champion français Georges Carpentier) est, bien entendu, qu’elle est une combinaison des deux. Mais ce débat, pour bien curieux qu’il puisse paraître aujourd’hui, semble avoir eu un effet extrêmement positif sur Leonard et les meilleurs entraîneurs du temps: leur faire concevoir la boxe comme un sport composé de deux arts distincts, possédant chacun leur logique et leurs techniques offensives et défensives propres: l’«outfighting» et l’«infighting». La conséquence qui en découle immédiatement pour un boxeur désireux d’apprendre à briller à toutes les distances est la suivante: il lui faudra développer une compréhension aiguë des deux types de logique, et s’astreindre à maîtriser fonctionnellement le plus grand nombre possible de techniques à toutes les distances, incluant donc des techniques de natures très différentes.
Voici divers exemples dans lesquels Leonard démontre sa finesse et sa virtuosité technique à toutes les distances.
Plus longues distances
Des coups droits vraiment droits
J’ai déjà traité dans un article sur Sergey Kovalev de l’importance qu’accordaient les entraîneurs et théoriciens du passé à la capacité de lancer des coups parfaitement droits, par quoi ils n’entendaient pas, comme nous en sommes venus à le faire aujourd’hui, «à peu près droits» ou «presque droits», mais bel et bien «parfaitement droits». L’une des raisons de cette importance? Frapper de façon vraiment straight, c’est-à-dire en gardant le coude complètement à l’intérieur, permet de maximiser la portée[v] et donc d’atteindre l’adversaire d’aussi loin que possible.
Voici quelques extraits offrant une démonstration éclatante de ce fait. Dans les trois premiers, Leonard frappe parfaitement droit avec la main avant, ce qui signifie qu’il exécute un jab impeccable sur le plan technique; dans les trois derniers, il le fait avec la main arrière, qui fonctionne alors presque comme un jab. On appréciera aussi au passage, en regardant les extraits, la capacité de Leonard de décocher ses coups absolument sans avertissement, afin d’optimiser ses chances de surprendre l’adversaire.
J’ouvre ici une parenthèse, car je soupçonne que certains de mes lecteurs demeurent dubitatifs quant à l’importance réelle que beaucoup d’anciens boxeurs et entraîneurs accordaient à la capacité de frapper vraiment droit. Je les inviterai d’abord à consulter mon article sur Sergey Kovalev mentionné plus haut, dans lequel je cite des sources anciennes. Puis je leur propose de regarder et surtout d’écouter les séquences suivantes du combat entre Marvelous Marvin Hagler et John «The Beast» Mugabi, disputé en 1986 pour la couronne mondiale unifiée des poids moyens. L’analyste de ce combat est Gil Clancy, un entraîneur new-yorkais de la très vieille école qui dirigea entre autres l’entièreté de la carrière amateur et professionnelle de l’ancien champion des mi-moyens et des moyens Emile Griffith. En tant qu’entraîneur, Clancy est aujourd’hui membre de l’International Boxing Hall of Fame, et comme analyste, il a notamment remporté le prix d’excellence en journalisme radiophonique et télévisuel de la Boxing Writers Association of America. Entre autres, Clancy était reconnu pour sa faculté hors pair à percevoir promptement les éléments déterminants lors du déroulement d’un combat, c’est-à-dire ceux qui dictent la logique profonde de l’action.
Or quel fut, selon lui, l’un de ces éléments déterminants dans le combat Hagler-Mugabi? D’abord une mise en contexte: au premier round, Hagler, un boxeur ambidextre, décida d’adopter une garde classique, c’est-à-dire de placer son bras gauche et son pied gauche à l’avant; mais, à partir du deuxième, il privilégia une fausse garde, ce qui fit de sa gauche sa main arrière. Il n’eut alors besoin que de lancer cette gauche six ou sept fois au deuxième round pour que Clancy détecte et verbalise un problème qu’il jugeait notable, tellement à vrai dire que, alors qu’il n’était pas dans ses habitudes de se répéter, il en parla quatre autres fois dans les quatre rounds suivants! Voici tous les extraits:
Mais pourquoi, demandera-t-on, cette incapacité d’Hagler à frapper de façon droite avec sa gauche joua-t-elle un rôle-clé dans le combat? Après tout, «Marvelous» ne l’a-t-il pas emporté au final de façon convaincante, par K.-O. au 11e round? Oui, certes, mais l’affrontement s’avéra beaucoup plus serré que ne l’avait prévu la quasi-totalité des analystes, qui s’attendait à voir le champion en titre dominer plus nettement et stopper en quelques rounds son aspirant. Pendant les cinq premières reprises, comme le nota d’ailleurs Clancy, le seul élément qui départagea un peu les deux combattants fut la qualité du jab de la droite d’Hagler, qualité qui tient en partie au fait que ce coup était … vraiment droit. Lors des quinze premières minutes du combat, relativement à tous les autres aspects, les deux boxeurs firent contre toute attente jeu égal. Or il paraît indéniable qu’Hagler aurait pu prendre beaucoup plus tôt un ascendant marqué s’il avait lancé sa gauche d’une façon techniquement plus correcte lorsqu’il était à plus longues distances. Qu’on en juge en effet en visionnant de nouveau au ralenti ces deux extraits, et en s’imaginant que son allonge compte quelques centimètres de plus.
Je terminerai cette parenthèse en attirant l’attention sur l’une des observations de Clancy dans le troisième des extraits plus haut. Il y signale que la gauche d’Hagler n’est pas droite comme elle l’est d’habitude, c’est-à-dire comme elle l’avait été dans ses combats précédents. En clair, le grand champion trahit sur ce point une régression technique. Quelle leçon en tirer? Elle est simple: tous les boxeurs, même ceux du meilleur calibre, doivent toujours continuer à cultiver consciemment les bases, sous peine de prendre de mauvais plis.
Le jab, mais aussi le «lead»
Dans mon article sur Sergey Kovalev, j’avais également expliqué que les anciens entraîneurs et boxeurs distinguaient nettement du «jab» un coup qu’ils appelaient le «lead» (ou le «jolt») de la main avant, et qui consistait en une frappe non pas seulement droite, mais impliquant aussi, au moyen d’une technique précise appelée le «falling step», une projection de poids considérable sur le pied avant, qui avait pour effet de décupler la puissance du coup et de le transformer en arme susceptible de produire des K.-O. ou des knockdowns. Pour les anciens, ce coup (que nous appellerions aujourd’hui un «power jab») revêtait une importance capitale, à telle enseigne qu’il devait absolument faire partie de l’arsenal de tout boxeur aspirant à l’excellence. De façon prévisible, Leonard offre quelques beaux exemples de cette technique.
Certains estimeront peut-être que la rareté relative avec laquelle Leonard utilise dans son premier combat contre Tendler le «lead» cadre mal avec l’importance accordée à ce coup dans les sources anciennes. Il faut toutefois comprendre ceci: même lorsque le «lead» est utilisé avec parcimonie et ne produit pas un résultat décisif, il conserve une utilité, comparable par exemple à celle de tenter une très longue passe au football américain ou canadien, même si elle rate. En lançant en effet un coup de longue portée aussi puissant, un boxeur crée chez son rival une appréhension de voir le coup exécuté à nouveau, ce qui lui intimera un certain respect et pourra causer chez lui des hésitations. Le boxeur qui maîtrise et utilise à bon escient le «lead» en retirera donc toujours des bénéfices concrets dans le ring.
Plus courtes distances
Un «chaos» riche en finesses
Les gens qui connaissent mal la boxe ont tendance, en voyant des pugilistes qui préfèrent demeurer à plus longues distances, à les déclarer «techniques», et en voyant des pugilistes qui cherchent à se battre à plus courtes, à les taxer de «bagarreurs» et de «moins techniques». Ces associations, largement répandues, tiennent à plusieurs causes, dont les deux que voici. D’une part, le combat à plus courtes distances donne souvent l’impression d’être plus brouillon ou chaotique, notamment parce que les combattants y lancent d’ordinaire plusieurs coups, incluant des coups en rafale. D’autre part, les frappes en situation de combat rapproché suivent une trajectoire courbe, ayant donc l’allure générale des coups utilisés par les combattants n’ayant pas été techniquement formés, les combattants de rue par exemple.
De telles associations sont toutefois radicalement fausses. De la même manière, en effet, qu’un boxeur préférant se battre de loin peut commettre des fautes techniques en lançant par exemple un simple jab, un boxeur qui choisit d’attaquer de près peut le faire avec art et en déployant une panoplie de manœuvres raffinées. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer Leonard à l’œuvre dans cette séquence d’une trentaine de secondes.
Sur le plan offensif, on constatera d’abord l’aisance avec laquelle le «Ghetto Wizard» décoche des crochets des deux mains, de même que l’uppercut de la main arrière. On sera aussi attentif au fait qu’il lance un beau «shovel hook», un coup qui, pour être bien exécuté, doit faire l’objet d’un apprentissage, car il présente des particularités techniques souvent ignorées ou mal comprises. Voici l’extrait précis.
J’ouvre ici une parenthèse pour parler du «shovel hook». Dans son livre Championship Fighting. Explosive Punching and Aggressive Defense (qui a la réputation d’offrir l’une des meilleures, sinon la meilleure description de la mécanique des coups en boxe), l’ancien champion des poids lourds Jack Dempsey consacre des développements lumineux à ce type de frappe, qui peut être lancé autant avec la main avant qu’avec la main arrière, et que nous désignons souvent aujourd’hui par l’expression «mi-uppercut, mi-crochet». Dempsey y insiste toutefois pour dire que le «shovel hook», lorsqu’il est bien exécuté, ne saurait être considéré comme un type d’uppercut[vi], c’est-à-dire comme un uppercut dans lequel la trajectoire du poing partirait d’un endroit différent (davantage sur le côté) que dans un uppercut «normal». Comme il l’explique en effet, deux caractéristiques techniques caractérisent un bon «shovel hook»: premièrement, le boxeur qui lance ce coup, en même temps qu’il projette son poing, doit faire «tournoyer son corps subitement de façon telle que sa hanche [du même côté que son poing] s’élève en suivant une trajectoire circulaire comparable à celle qu’on retrouve dans l’action de pelleter» (d’où le nom de «shovel hook»); deuxièmement, le boxeur doit faire contact avec sa cible principalement au moyen de ses «striking knuckles», par quoi Dempsey entend les jointures de l’auriculaire, de l’annulaire et du majeur, afin d’assurer la transmission la plus directe possible de la puissance créée par le mouvement du corps. Or la première de ces deux caractéristiques induit une différence mécanique essentielle entre le «shovel hook» et l’uppercut, car dans un uppercut correctement lancé, «la hanche a tendance à se déplacer ou à s’effacer vers le côté [opposé au poing], un peu comme la hanche d’un homme qui frappe une balle de golf». Les «shovel hooks» sont donc bel et bien, comme l’indique leur nom, une sorte de crochet, et ils ne peuvent être ramenés, sous le rapport de la technique, à une sorte d’uppercut, pas même à un «mi-uppercut».
Dempsey est également limpide, dans son livre, quant à l’efficacité potentiellement dévastatrice des «shovel hooks». Entre autres, selon lui, le boxeur qui aura appris, à force de patience et d’application, à bien les exécuter, possèdera «l’un des coups les plus puissants de l’arsenal humain»[vii]. Le mieux ici est de laisser Dempsey démontrer lui-même ce fait. Voici donc comment, d’un seul «shovel» de la main avant, le «Manassa Mauler» passa en 1927 un spectaculaire K.-O. au futur champion des poids lourds Jack Sharkey. Il est impossible, en visionnant ces images, de ne pas être émerveillé par le caractère à la fois extrêmement compact et explosif du coup appliqué par Dempsey.
Fermons toutefois cette parenthèse et revenons à l’extrait d’une trentaine de secondes où Leonard se bat à de plus courtes distances, montré plus haut. Sur le plan défensif cette fois, on constatera que Leonard, qui pourtant se tient toujours droit à plus longues distances, multiplie les mouvements de tronc prononcés à des fins défensives. Ce constat illustre la différence de «logique», à laquelle je faisais allusion plus haut, qui existe entre l’«outfighting» et l’«infighting». Leonard, grâce à son cerveau souple et aiguisé (et à sa fameuse «énergie mentale»), n’éprouve aucune difficulté à modifier instantanément et complètement sa façon de se battre en fonction de la distance qui le sépare de son adversaire, c’est-à-dire à mettre en œuvre des techniques radicalement différentes selon les cas.
De façon particulièrement intéressante, on remarquera que, à la manière des boxeurs qui ont pratiqué à un haut niveau le style «peek-a-boo» développé par Cus D’Amato, par exemple Floyd Patterson et Mike Tyson, il effectue ces mouvements de tronc prononcés non pas seulement en réaction aux contre-attaques de Tendler, mais également de façon préventive, ce qui est préférable en situation de combat rapproché où le temps de réaction dont bénéficient les boxeurs est souvent minime. Autrement dit, on trouve chez Leonard la conception selon laquelle une manœuvre complète à courtes distances sera idéalement composée de deux actes différents, mais intégrés en un tout unique: une attaque, par exemple un crochet de la main avant, suivie immédiatement d’un mouvement défensif, par exemple une inclinaison du buste vers l’avant et/ou une roulade du tronc. Voici les deux extraits où ce fait ressort avec le plus de netteté.
Enfin, on trouve dans l’extrait long montré plus haut une illustration d’un principe de grande importance, que je signale rapidement. En effet, concevoir la boxe comme composée à la base de deux arts distincts, l’«outfighting» et l’«infighting», a comme conséquence de mettre en relief un troisième genre de situation fondamentale dans le ring, soit la transition entre les distances. Or lors des phases de transition, des occasions particulières s’offriront aux boxeurs astucieux comme Leonard, par exemple de surprendre l’adversaire, au besoin grâce à un coup délivré de façon moins technique qu’à l’accoutumée. En doutez-vous? Alors regardez de nouveau cet extrait.
La boxe: un pur «sport de frappe»?
Il est courant de voir la boxe classifiée comme un pur «sport de frappe» et, en effet, parmi les sports de combat, elle est très pure. Mais l’est-elle entièrement? On passe trop souvent sous silence que le noble art renferme un élément de préhension (grappling), qui se réalise lorsque l’un ou les deux boxeurs accrochent. Évidemment, Leonard était un maître dans cet aspect aussi.
Avant de visionner des extraits qui l’illustrent, une note s’impose toutefois. Car force est de reconnaître que, sous les rapports des niveaux et des types d’accrochage tolérés entre les câbles, la boxe a beaucoup changé depuis un siècle. Alors qu’à l’époque de Leonard, il était courant pour les pugilistes de devoir passer plusieurs minutes d’un combat en situation d’accrochage, et d’être forcés de se sortir eux-mêmes de la situation, les arbitres d’aujourd’hui tendent à séparer hâtivement les combattants et à réprimander ceux qui s’y montrent trop actifs. La maestria de Leonard se verrait donc à plusieurs égards brimée dans les conditions actuelles.
Examinons néanmoins certaines de ses manœuvres. Je me contenterai d’une description sommaire, car une analyse plus complète conviendrait mieux dans le cadre d’un autre écrit, consacré spécialement à l’accrochage.
D’abord, plutôt que de demeurer passif en situation d’accrochage, Leonard cherchait à profiter des occasions qui s’offraient à lui de lancer des coups dotés d’une certaine puissance.
Ensuite, l’une de ses techniques préférées consistait à faire tourner son rival, souvent en le saisissant derrière la tête d’une façon qui rappelle certaines techniques pratiquées en boxe thaïlandaise.
Enfin, il aimait faire tourner son adversaire et enchaîner avec des frappes dans les ouvertures ainsi créées, frappes qui incluaient des uppercuts bien sûr, mais aussi des «shovel hooks». Dans le second des extraits plus bas qui le montrent, on sera également attentif au superbe blocage de la gauche de Tendler qu’il réalise avec sa main droite. On l’aura probablement noté: lorsque Léonard est à plus longues distances, il n’utilise jamais les blocages, préférant avoir recours à des techniques défensives plus raffinées. Il est toutefois indéniable que, à plus courtes distances, les blocages sont quelquefois la seule option qui s’offre. Donc Leonard les pratiquait aussi.
J’ajoute ici quelques observations. Considérant l’importance que l’accrochage pouvait revêtir dans le déroulement des combats livrés dans les premières décennies du 20e siècle, les anciens manuels accordaient aux techniques qui s’y rapportent une importance fondamentale et en faisaient des habiletés de base devant être maîtrisées par tout boxeur[viii]. Tout le contraire donc de la réalité que nous connaissons maintenant depuis assez longtemps, où l’on voit même des pugilistes «d’élite» ignorer comment accrocher efficacement ou se déprendre d’un adversaire qui accroche, ce qui montre manifestement que ces techniques ne sont plus couramment enseignées. Il s’agit d’un état de fait que certains estimeront peut-être normal étant donné l’évolution dans le comportement des arbitres que j’ai décrite plus haut, mais on peut légitimement se demander si nous ne sommes pas tombés dans une forme d’excès et dans une perte de raffinement regrettable. Ceux qui voudront se faire une meilleure idée sur la question pourront constater l’efficacité que peuvent avoir, encore aujourd’hui, les techniques «old school» en matière d’accrochage, en visionnant quelques combats d’un boxeur récent qui se faisait une fierté d’en maîtriser plusieurs: Bernard Hopkins.
Trois autres aspects
Être un boxeur cérébral et complet comme Leonard comporte évidemment quantité d’autres aspects. Dans la dernière partie de cet article, j’en signalerai trois qui ressortent avec netteté dans le combat Leonard-Tendler 1.
Le premier touche à l’importance des feintes en boxe. Comme l’explique Mike Gibbons, un très bon boxeur d’antan, dans son livre de 1925 How to Box, feinter est la clé du «ring generalship», car il s’agit entre autres de la façon pour un pugiliste de recueillir des informations sur la manière dont un adversaire réagira à ses manœuvres, de même que sur ce que l’adversaire tente lui-même de faire. Or on pourra visionner à nouveau n’importe quels extraits de quelques dizaines de secondes de l’affrontement Leonard-Tendler 1 pour constater que le champion en titre des poids légers s’appliquait à feinter continuellement avec les bras (observez-le aussi au passage: la même chose pourrait être dite de son excellent aspirant). Et même si les images du duel sont trop floues pour nous permettre de vraiment l’apercevoir, les anciens témoignages sont formels et unanimes: Leonard feintait aussi massivement de toutes les autres façons possibles, incluant par exemple avec les épaules ou même les yeux.
Le second aspect se rapporte à la capacité de bien percevoir et comprendre ce qui se passe dans le ring et de réagir promptement pour changer l’allure d’un combat, lorsque besoin est. On l’aura peut-être remarqué: les cinq premiers rounds sont relativement partagés, et Tendler se montre particulièrement efficace dans la cinquième reprise, où il boxe avec rythme et arrive généralement à faire reculer Leonard. Le «Ghetto Wizard» allait-il se laisser faire ainsi? La réaction du maître ne se fit pas attendre. Dès le début du sixième, on le voit attaquer Tendler avec vigueur à plus courte distance, afin de briser son rythme et de le déstabiliser.
Toujours dans le but de casser le rythme de Tendler, il tente par ailleurs au sixième des attaques surprises, comme dans cette séquence où il se décale subitement vers sa gauche et touche avec un puissant crochet de la main arrière. On prêtera également attention au deuxième coup qu’il lance dans l’extrait, un autre coup de puissance, cette fois un crochet de la gauche exécutée techniquement à la perfection. Cette seconde frappe rate la cible, mais le message envoyé à Tendler est sans ambiguïté, encore une fois: «si tu te transformes trop en pressure fighter et cherches constamment à t’approcher de moi, je possède toutes les armes requises pour te faire mal».
Enfin, dans les dernières secondes du round, Leonard – qui avait jusque-là un peu négligé de frapper au corps – place une lourde droite au flan de «Lefty» Lew, afin de lui saper son énergie.
Quel résultat eurent tous ces procédés? Regardez le septième round: Tendler y est beaucoup, beaucoup moins porté sur l’attaque qu’au cinquième…
Le troisième aspect que je tiens à souligner concerne la capacité de garder la tête parfaitement froide entre les câbles, quoi qu’il advienne. Rien ne démontre mieux cette qualité de Leonard que l’extrait que voici, qui est sans doute, parmi tous ceux que je fais voir dans cet article, mon préféré. Au début de l’extrait, le grand maître Leonard, qui tirait orgueil de sa perfection technique, a l’air d’un … débutant malhabile lorsqu’il fend lourdement l’air avec un large crochet de la main arrière, ce qui le place dans une position apparemment vulnérable! Allait-il se laisser désarçonner par ce fait, quelque peu gênant pour lui? Regardez plutôt comment il réagit à la charge immédiate de Tendler, qui, pour sa part, croyait pouvoir profiter du déséquilibre de son adversaire pour fondre sur lui et le frapper avec facilité.
Autrement dit, Leonard conserva un flegme olympien et il fit immédiatement oublier sa bourde en servant à Tendler une manœuvre défensive spectaculaire et de haut niveau. Également tout à fait magnifique à voir, selon moi, est la désinvolture avec laquelle, à la fin de la séquence, il remonte sa culotte, comme si absolument rien ne venait de se passer! Comment ne pas profondément admirer un comportement aussi impérial dans le ring? Comme on le comprendra maintenant, je l’espère, une telle assurance, si absolue, ne reposait pas sur de fausses illusions de Leonard quant à sa valeur ou à ses capacités, mais s’appuyait bien plutôt sur la conscience, rationnelle et objective, de détenir une science de boxe pleine, entière et totale.
Je serai bref dans ma conclusion, car j’ai le sentiment d’avoir exprimé l’essentiel dans les pages qui précèdent. Je m’en voudrais toutefois de ne pas effectuer, en terminant, un lien entre mon analyse et le remarquable article publié récemment par Rénald Boisvert, «Styles de boxe: faire tomber les barrières!». Dans cet écrit, Boisvert encourage les entraîneurs à initier leurs boxeurs à différents styles de boxe et à «tous les éléments techniques qui les composent», afin de faire s’accroître leur «capacité de polyvalence et d’adaptation», et de leur donner une «profondeur dans l’exécution de leur sport». Or je pose la question suivante: croyez-vous que l’immortel «Ghetto Wizard» Benny Leonard, qui cent ans après sa conquête du titre des poids légers, représente toujours la crème de la crème en matière d’intelligence pugilistique et de «ring generalship», aurait été en accord ou en désaccord avec la position défendue par Boisvert?
Je dis que poser la question, c’est y répondre.
Notes
[i] Leonard adhérait donc à plein à l’idée, qui se trouve formulée dans le livre Fundamentals of Boxing d’une autre très grande légende des années 1920 et 1930, Barney Ross, selon laquelle les trois buts essentiels de l’entraînement en boxe consistent à 1) amener la vitalité physique à son sommet, à 2) peaufiner les habiletés techniques et à 3) parfaire les connaissances stratégiques.
[ii] Un autre qui en était conscient est l’ancien champion du monde des poids mouches Jimmy Wilde, qui affirme dans son court essai de 1927, The Art of Boxing, qu’un «esprit vif» est l’un des trois talents de base les plus importants en boxe.
[iii] J’ai choisi cet affrontement car il est l’un des deux combats de Leonard actuellement disponibles sur le Web. L’autre est son duel de 1932 contre Jimmy McLarnin. En 1932, Leonard était âgé de 36 ans et tentait un retour – motivé par des pertes financières lors du krach boursier de Wall Street trois ans plus tôt – après avoir été inactif de 1924 à 1931. Ses habiletés avaient alors grandement diminué et l’on ne saurait juger de sa valeur en regardant sa performance contre McLarnin, pas plus qu’on ne saurait juger par exemple des habiletés de Sugar Ray Leonard en regardant son combat contre Hector Camacho.
[iv] Afin de simplifier mon exposé, je vais utiliser dans le présent article l’expression «plus longues distances» pour désigner à la fois la «longue distance» et la «moyenne distance», et l’expression «plus courtes distances» pour désigner à la fois la «courte distance» et la «très courte distance». En accord avec les explications données dans le livre de Jack Dempsey, Championship Fighting. Explosive Punching and Aggressive Defense, j’entends par «longue distance» la distance à laquelle un boxeur peut atteindre son adversaire grâce à un coup droit et à un déplacement du pied avant; «moyenne distance» la distance à laquelle il peut l’atteindre grâce à un coup droit sans déplacement des pieds; «courte distance» la distance à laquelle il peut l’atteindre avec une frappe où le bras est plié à angle droit (ou approximativement); et «très courte distance» la distance à laquelle il peut l’atteindre avec une frappe extrêmement compacte, par exemple un uppercut où le bras est plié au maximum ou presque.
[v] Si vous avez besoin de vous en convaincre, placez-vous devant un mur à la distance exacte où votre poing touche au mur quand vous avancez le bras avant ou arrière en maintenant le coude bien à l’intérieur, puis tentez, sans bouger davantage les jambes ou le tronc, de toucher à nouveau le mur en étendant le même bras, mais en sortant cette fois le coude, ne serait-ce que légèrement. Vous constaterez alors clairement l’un des avantages de frapper vraiment straight.
[vi] L’erreur était apparemment courante à son époque, et elle semble encore répandue aujourd’hui. Voir par exemple: https://www.youtube.com/watch?v=CfngycvnI28
[vii] Je signale un autre détail fascinant: selon Dempsey, qui avait livré dans sa jeunesse des centaines de combats libres dans des tavernes et autres endroits de même acabit, les «shovel hooks» sont, avec les «leads», les coups les plus utiles pour les combattants à poings nus qui privilégient les frappes avec les mains. Car voyez-vous, la question de la meilleure façon pour un boxeur d’affronter un lutteur par exemple ne s’est pas posée pour la première fois en Amérique du Nord avec l’avènement des arts martiaux mixtes dans les années 1990. Elle s’était en effet déjà posée à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, quand la boxe était le sport de combat et d’auto-défense par excellence. Dempsey considérait que la meilleure approche dans un combat libre contre un adversaire dont les habiletés sont inconnues est de le frapper d’entrée de jeu avec un maximum de force de la plus longue distance possible, afin de minimiser ses occasions de mettre en œuvre ses habiletés. Mais que faire si cette approche ne fonctionne pas et que l’adversaire, qui s’avère être un lutteur, arrive à s’approcher et commence à agripper? Il faut alors évidemment le frapper avec un maximum de puissance à très courte distance, d’où l’utilité capitale des «shovel hooks».
[viii] Comme l’écrit Philadelphia Jack O’Brien dans son livre précédemment cité: «L’accrochage est l’une des branches les plus importantes de la boxe, particulièrement d’un point de vue défensif. Il s’agit d’un véritable art qui n’a rien à voir avec la force brute». Par conséquent, conclut O’Brien, il est nécessaire de consacrer aux techniques d’accrochage «beaucoup d’entraînement», autant par exemple qu’aux différentes façons d’esquiver les coups. Barney Ross dit essentiellement la même chose dans l’ouvrage dont j’ai parlé plus haut dans la note i.
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]]>Il y a 33 ans aujourd’hui, le 25 mars 1984, avait lieu l’un des combats locaux ayant suscité le plus d’intérêt dans l’histoire de la boxe au Québec: le second affrontement entre Dave Hilton Jr (17-0-1, 13 K.-O.) et Mario Cusson (27-1-2, 11 K.-O.), tenu au Forum de Montréal devant une foule record de 19807 spectateurs.
Nos lecteurs plus âgés se souviendront probablement que, un peu plus de trois mois auparavant, les deux pugilistes s’étaient affrontés une première fois dans un combat qui avait pris fin en queue de poisson lorsque Cusson avait été coupé à l’arcade sourcilière par un coup de tête accidentel au 3e round, ce qui avait forcé l’arrêt immédiat des hostilités et un verdict de nulle technique.
Les amateurs de sport du Québec étaient extrêmement divisés dans leurs pronostics avant le second affrontement, qui comme le premier mettait en jeu la ceinture canadienne des mi-moyens détenue par Cusson. Le déroulement concret du combat ne laissa cependant aucun doute sur la supériorité du représentant des «Fighting Hilton».
Dès les toutes premières secondes du premier round, Davey s’aperçut que Cusson n’entendait pas reculer et, conscient de sa plus grande puissance, il tenta alors une charge au cours de laquelle il lança plusieurs coups imprécis, mais qu’il termina par une belle droite à bout portant placée à l’oreille gauche de son rival. Le boxeur qui avait été formé par Georges Drouin s’affaissa aussitôt comme s’il avait été foudroyé, le visage convulsé par la douleur. Malgré ses vaillants efforts, il fut incapable de se relever avant le compte de dix administré par l’arbitre, Guy Jutras. Le temps officiel du K.-O.? 29 petites secondes…
«Je ne m’attendais jamais à ce qu’il essaie d’échanger des coups au début du combat», avait avoué le nouveau champion à sa sortie du ring. «Je m’attendais plutôt à ce qu’il essaie de m’épuiser. J’avais l’intention de prendre mon temps pendant cinq rounds avant d’ouvrir la machine. J’ai toutefois vu une ouverture et me suis élancé de toutes mes forces. Si vous regardez le film de notre premier combat, vous constaterez que j’ai lancé mon crochet de droite souvent, mais qu’il n’a jamais touché la cible. J’ai travaillé là-dessus à l’entraînement et je suis content de voir que mon travail a rapporté quelque chose ce soir. C’est malheureux pour Cusson et tant mieux pour moi».
On notera que lors de son camp d’entraînement pour le combat, tenu dans le nord des États-Unis, Hilton avait travaillé comme à son habitude avec son père Dave Sr, mais aussi avec le légendaire Cus D’Amato, qui supervisait alors le développement d’un certain Mike Tyson.
Quant à Cusson, il laissa transparaître une certaine fragilité psychologique dans les explications qu’il offrit aux journalistes le lendemain de sa cuisante défaite. «J’ai été affecté par les huées du public lorsque nous avons été présentés dans le ring», avait-il admis. «J’aurais pensé qu’après notre premier combat, où la foule était partagée, elle aurait penché en ma faveur cette fois. Je ne pensais pas commencer mon combat de cette façon, mais je n’avais plus la tête froide. J’ai porté deux jabs et il a répliqué. J’ai alors décidé d’aller en corps-à-corps, mais il m’attendait avec ses deux mains».
Signalons en terminant que le combat Hilton-Cusson 2 ne fut pas le seul K.-O. expéditif auquel assistèrent les nombreux spectateurs présents au vénérable Forum ce soir-là. Dans un duel de cogneurs présenté lors de la sous-carte, «L’homme aux poings d’acier», Denis Sigouin, envoya le batailleur de Sept-Îles Ghyslain Deroy au pays des rêves après seulement 1 minute et 53 secondes d’action au premier round. Grâce à cette spectaculaire victoire, le Hullois se mérita un combat contre Dave Hilton Jr, qui eut lieu quatre mois plus tard.
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]]>Il y a 46 ans aujourd’hui, le 8 mars 1971, avait lieu à New York le «combat du siècle» : le premier affrontement entre Muhammad Ali et Joe Frazier, remporté par décision unanime des juges par «Smokin’ Joe». Afin de rendre hommage à la brillante performance de ce dernier, dont le point d’orgue fut un knockdown de «The Greatest» au 15e et dernier round, j’ai compilé diverses informations sur la préparation exemplaire à laquelle se soumit Frazier pour ce duel, l’une des grandes clés de son succès contre un adversaire plus grand, plus gros et, à la base, plus doué et talentueux que lui. On y trouvera la preuve de la détermination absolue et du très grand sérieux à l’entraînement du boxeur de Philadelphie, dont l’endurance exceptionnelle et l’amour inconditionnel du combat demeurent des sommets rarement égalés dans l’histoire du noble art.
Voici les six faits saillants :
1. Frazier établit son camp d’entraînement au Concord Hotel dans le nord de l’état de New York, un endroit relativement isolé qu’il connaissait bien et qui lui permit de se concentrer exclusivement sur sa préparation. Quant à Ali, il tint, comme à son habitude, son camp à Miami, un lieu qui offrait de multiples distractions, mais qu’il jugeait néanmoins préférable à celui choisi par son rival. Comme il l’expliqua en effet dans l’une des tirades dont il avait le secret : «Frazier est seul là-haut et la solitude n’est pas bonne. Ici en Floride, je rencontre des gens, je bois chaque jour du jus d’orange ou de carotte frais, et j’absorbe du vrai soleil jusqu’aux os. Frazier est là-haut à manger de la nourriture d’hôtel. Moi, j’ai deux gentilles dames qui vont au marché tôt le matin et achètent les meilleurs produits, et quand je rentre chez moi en soirée, tout est bien cuisiné, avec un bouillon de légumes et peut-être un peu d’agneau. Pas de porc ou de fruits de mer, cependant. Ce sont des charognards et je mange casher». Notons que, en dépit des dires d’Ali, rien n’atteste que Frazier se contentait de manger de la «nourriture d’hôtel», et que son entourage et lui négligeaient la qualité de son alimentation.
2. Chaque matin, vers 6 heures, Frazier effectuait 6 miles de course autour d’un lac glacé, en pleine nature, de façon à respirer seulement de l’air pur. «Smokin’ Joe» adorait le jogging et fut pendant toute sa vie un bruyant défenseur de l’importance capitale de la course pour les boxeurs. L’une de ses citations les plus connues à cet effet est la suivante : «Vous pouvez avoir un plan pour le combat, mais lorsque l’action débute, il peut ne pas fonctionner, et tout devient alors question de réflexes, c’est-à-dire de préparation. C’est alors que le temps et les efforts réels que vous avez investis à faire du jogging deviendront clairs aux yeux de tous. Si vous avez manqué d’assiduité au travail dans la noirceur des petites heures du matin, eh bien, vous en subirez les conséquences à ce moment, sous la lumière vive des projecteurs».
On notera que l’entraîneur d’Ali, Angelo Dundee, prescrivait en général à ses boxeurs de courir des distances plus courtes, allant de 3 à 5 miles par jour. Comme il l’expliqua en effet lors d’une entrevue donnée dans les années 1980 : «Je veux des boxeurs, pas des marathoniens!». Une curiosité : selon Dundee, les 3 à 5 miles pouvaient être parcourus à n’importe quelle vitesse, incluant … à la marche, le but premier de la course étant selon lui de tonifier les jambes, et non pas de développer les capacités cardio-vasculaires.
3. Fidèle aux coutumes de sa ville de résidence, Frazier livra des guerres sans merci à ses partenaires d’entraînement lors de ses séances de sparring, faisant endurer à ces derniers un véritable enfer. Comme le révèle l’une des notes récemment publiées de Dave Wolf, qui avant de devenir gérant avait trempé dans le journalisme sportif et fut pendant plusieurs années un proche du médaillé d’or olympique de 1964, visitant régulièrement ses camps d’entraînement : «Joe Frazier n’arrive pas à comprendre le manque de désir de certains de ses sparring partners. Il mange et il vit avec eux. Seuls les plus durs sont capables de survivre longtemps à ses côtés». Tout le contraire du comportement d’Ali, dont l’approche nonchalante et décontractée en combat simulé poussa son entraîneur, Angelo Dundee, à déclarer publiquement quelques semaines avant le 8 mars : «Dans un gymnase, il est le pire boxeur que j’ai jamais vu!».
4. Frazier renforça sa capacité à encaisser des coups au corps en subissant quelques fois par semaine la torture d’un medicine ball de 18 livres lancé sur lui, mais Ali n’eut jamais recours à ce procédé dans sa routine d’entraînement. Certains observateurs se questionnèrent sur ce fait, et émirent l’hypothèse que, trop soucieux de son apparence, il ne voulait pas voir son corps couvert de marques.
Peut-être aussi que le choix d’Ali et de ses entraîneurs dénotait une conception différente et, sur ce point, moins «old school» de la préparation physique. Comme l’écrit en effet Frazier dans son livre, Box Like the Pros : renforcer son corps en encaissant l’impact d’un medicine ball «est ce que Joe Louis et Rocky Marciano et Henry Armstrong et Sandy Saddler faisaient. Certains entraîneurs aujourd’hui vous diront que c’est une mauvaise méthode, qui n’a aucune utilité pour raffermir votre corps, mais ils ont tort. Les boxeurs de la vieille école étaient des durs et étaient en forme, et le medicine ball les aidait à l’être. (…) Servez-vous du medicine ball correctement, et vous serez le boxeur le plus résistant dans le ring le soir du combat!».
5. Lors de son camp, Frazier n’étudia pas de films des combats d’Ali pour se préparer, et il ne chercha à apporter aucune modification, même minime, à son style. La raison de ce fait est simple: ses entraîneurs, Yank Durham et Eddie Futch, s’étaient employés depuis plusieurs années à lui donner tous les outils pour avoir une efficacité maximale contre Ali, en prévision d’un combat qui, dans leur esprit, allait forcément se réaliser un jour. Ils considéraient donc que le style de «Smokin’ Joe» était à point, et ne requérait aucun ajustement.
Les principaux éléments du style de Frazier qui devaient favoriser son succès étaient les suivants : bouger constamment le tronc afin d’esquiver les coups et de se positionner plus facilement à courte distance; demeurer penché afin de forcer Ali à frapper vers le bas (ce qu’il n’avait pas l’habitude de faire); et frapper abondamment au corps, afin d’affaiblir Ali et de ne pas lui donner la chance d’utiliser ses habiles esquives lorsque frappé en direction de la tête.
Une préparation un peu plus spécifique eut toutefois lieu sur le plan stratégique. Entre autres, Eddie Futch avait remarqué que la mécanique de l’uppercut de la droite d’Ali était incorrecte et le plaçait dans une position vulnérable, laissant sa tête à découvert pendant une trop longue période de temps. Il donna donc à Frazier l’instruction de lancer un crochet de gauche par-dessus l’uppercut d’Ali (voir la photo à la une de cet article), une stratégie qui fonctionna si bien qu’elle produisit le knockdown du 15e round .
6. De façon générale, Ali ne démontra pas le même sérieux que Frazier dans sa préparation. Des journalistes remarquèrent qu’il lui arriva de manquer des séances d’entraînement. Sa consommation abondante de Pepsi fut aussi notée, et explique sans doute en partie pourquoi, sur certaines photos prises avant le combat, il apparaît légèrement ventru. À l’inverse, l’assiduité de Frazier fut sans faille. Dans son livre Box Like the Pros, «Smokin’ Joe» indique avec précision quelle était sa routine d’entraînement alors qu’il était champion du monde. En voici la base, qui pouvait subir de jour en jour quelques variations :
Telle fut la préparation de Joe Frazier en prévision du 8 mars 1971. Les notes de Dave Wolf révèlent qu’il ne dormit pas dans la nuit du 7 au 8, tant était grande sa nervosité. Les mêmes notes révèlent aussi que Frazier, malgré tout, demeura lucide dans les heures précédant l’affrontement. Il considérait comme bonnes ses chances de l’emporter, mais envisageait également la possibilité d’une défaite, dont il n’aurait toutefois pas à rougir. Les dieux de la boxe, sans doute impressionnés par sa préparation exemplaire, lui furent cependant favorables. Devant la foule du Madison Square Garden, qui était largement contre lui et encourageait son adversaire, il domina «The Greatest» et imposa à la postérité une conclusion immuable, qui ne pourra jamais être niée: le grand Joe Frazier, et non pas Muhammad Ali, a remporté le combat du siècle.
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]]>Cet article Il y a 15 ans aujourd’hui, Éric Lucas battait Pazienza est apparu en premier sur Boxe québécoise pour tous les amateurs francophones – 12rounds.ca.
]]>Il y a 15 ans aujourd’hui, le 1er mars 2002, Éric Lucas (35-4-3, 13 K.-O.) défendait avec succès son titre WBC des super-moyens pour la deuxième fois en remportant une décision unanime en douze rounds (119-110, 117-112 et 117-111) contre le vétéran Vinny Pazienza (49-10-0, 30 K.-O.), au Foxwoods Resort situé au Connecticut.
Avant le combat, le Québécois avait laissé transparaître une confiance extrême dans beaucoup de ses propos: «Paz est intelligent, arrogant aussi, et il tentera par tous les moyens de me déconcentrer», avait-il expliqué. «Il est rusé. Il tentera d’une façon ou d’une autre de me piéger: coups de coude, coups bas, attaques menées sous différents angles, il feintera d’être ébranlé afin de mieux sortir par la suite son artillerie lourde, il voudra aussi m’engager à tout prix dans un combat de rue, une invitation que je me ferai un devoir de refuser».
«Mon jeu sera de le tenir à distance et de lui lancer des jabs à la figure. Chaque fois qu’il viendra trop près de moi, il devra en payer le prix. La clef de ce combat, ça sera de ne pas paniquer et de ne jamais m’éloigner de mon plan de match. Ma préparation a été super et je me sens bien. Ça ne devrait pas être un combat compliqué. Je vais gagner avant les douze rounds. Je suis fort et Paz sera une cible facile. Il ne pourra résister longtemps».
La prédiction de Lucas ne s’avéra toutefois pas, notamment parce que le boxeur de St-Julie se blessa à la main droite au 4e round, et aussi parce que son adversaire américain utilisa son bon jeu de jambes pour se protéger. Les spectateurs eurent donc droit à un combat un peu monotone, que Lucas contrôla grâce à son jab, mais qu’il ne remporta pas de façon spectaculaire.
«Paz m’a surpris», avait avoué Lucas après l’affrontement. «Je pensais qu’il serait plus agressif, qu’il se lancerait davantage à l’attaque, comme un gars qui a faim, qui veut sa 50e victoire ou un titre. Au lieu, il s’est déplacé dans l’arène, il était plus mobile que d’habitude, et ça m’a donné un combat plus difficile que prévu».
Quant à Yvon Michel, il expliqua pour sa part: «Nous avons choisi Paz parce qu’il se porte à l’offensive et que c’est parfait pour Éric. S’il s’était battu comme d’habitude, s’il avait été plus agressif, Éric lui aurait passé le K.-O.».
Signalons au passage que, lors de la sous-carte du gala Lucas-Pazienza, le Québécois Martin Desjardins perdit une décision unanime en quatre rounds contre un jeune Chad Dawson, qui en était alors à son cinquième combat professionnel seulement.
Lucas empocha 300 000$ US pour sa performance, qu’il était possible de regarder en direct au Québec sur le canal Indigo, au coût de 49,95$.
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]]>Cet article Quelques faits sur Sergey Kovalev est apparu en premier sur Boxe québécoise pour tous les amateurs francophones – 12rounds.ca.
]]>Vous désirez en savoir plus sur Sergey Kovalev (30-0-1, 26 K.-O.), qui affrontera Andre Ward dans une semaine ? La meilleure façon de commencer à vous renseigner sur le «Krusher» est évidemment de consulter le détail de sa fiche sur BoxRec, mais pour vous permettre d’aller plus loin, voici quelques points frappants sur la vie et la carrière du champion russe:
– Kovalev est né le 2 avril 1983 à Kopeïsk, une ville minière adjacente à Tcheliabinsk, une agglomération beaucoup plus importante de plus d’un million d’habitants, située à 1500 kilomètres à l’est de Moscou. Tcheliabinsk est l’un des grands centres du hockey en Russie, où a notamment vu le jour Sergueï Gontchar, l’ancien défenseur des Canadiens de Montréal.
– Les parents du «Krusher» ont divorcé alors qu’il était encore tout jeune. Il a grandi dans un milieu pauvre, et l’on rapporte que, pendant plusieurs années, ses deux frères et lui se sont nourris presque exclusivement d’œufs et de spaghettis.
– Il a commencé à boxer à l’âge de 11 ans, dans un gymnase situé tout juste derrière son école qui lui avait été recommandé par des amis. Sa fiche chez les amateurs s’établit à 193-22, incluant plusieurs titres nationaux chez les juniors et séniors, de même que deux médailles d’or aux Jeux mondiaux militaires.
– Comme il l’a lui-même déjà admis, son départ de l’équipe nationale russe et son passage chez les professionnels s’expliquent en partie par la très forte compétition qui, chez les amateurs, existait entre lui, Artur Beterbiev et Matt Korobov. À en croire Kovalev et ses proches, Beterbiev aurait bénéficié d’un traitement de faveur de la part du système russe, de sorte que les plus grands succès obtenus par le Tchétchène sur la scène internationale amateur ne seraient pas la preuve de sa supériorité sur l’actuel champion IBF, WBA et WBO des poids mi-lourds.
– Afin de devenir professionnel, Kovalev a déménagé aux États-Unis en 2009, où il eut d’abord comme entraîneur principal Don Turner, qui avait déjà travaillé avec, entre autres, Larry Holmes et Evander Holyfield. Turner, qui fait toujours partie aujourd’hui de l’équipe du «Krusher», a émis dans l’édition de décembre 2013 du Ring Magazine une opinion quelque peu surprenante, mais fort intéressante, sur la force de frappe – réputée dévastatrice – de son protégé: «Kovalev ne frappe pas si fort, mais il frappe au bon moment», avait-il affirmé. «Quand on frappe un gars exactement au bon moment, c’est comme si on le frappait deux fois plus fort qu’en temps normal».
– John David Jackson, un ancien champion du monde chez les 154 et 160 livres, a depuis pris la relève de Turner comme entraîneur principal de Kovalev et il était dans le coin du Russe lors des deux duels contre Pascal.
– Le combat nul à la fiche de Kovalev est une nulle «technique», s’étant produite en 2011 lorsque le «Krusher» a accidentellement porté un coup derrière la tête de son adversaire, Grover Young. Ce dernier s’est retrouvé dans l’incapacité de continuer, forçant ainsi l’arrêt du combat au deuxième round.
– Kovalev et son clan refusent de faire tout commentaire sur la tragédie ayant eu lieu à la fin de 2011 à Ekaterinbourg en Russie, alors que Roman Simakov avait perdu la vie à cause de blessures subies trois jours plus tôt dans une défaite par T.K.-O. contre le «Krusher». Pendant les heures où Simakov fut hospitalisé, Kovalev avait cependant émis le communiqué suivant: «Aujourd’hui, mon épouse Natalya et moi avons visité une église, allumé des chandelles et demandé au prêtre de prier pour la santé de Roman. Je demande sincèrement à ses proches de m’excuser, ce qui est arrivé n’était pas intentionnel».
– L’histoire du noble art démontre que les boxeurs qui ont connu l’horreur de tuer l’un de leurs adversaires dans le ring deviennent souvent moins enclins à rechercher le K.-O., mais à la suite de son combat contre Simakov, Kovalev stoppa ses huit adversaires suivants, incluant sept en moins de quatre rounds.
– La férocité dont peut faire preuve Kovalev entre les câbles a déjà été comparée à celle du grand boxeur argentin Carlos Monzón, qui fut champion des poids moyens de 1970 à 1977. En dehors du ring, cependant, le «Krusher» a la réputation d’être un homme facétieux et amical, qui priorise les besoins de sa famille et s’intéresse aux voitures et aux voyages.
– Kovalev a remporté le prix du «boxeur de l’année 2014» décerné par The Ring. Selon les éditeurs du magazine, plusieurs pugilistes auraient pu se mériter le prix en 2014, mais ils ont jugé que, au final, les accomplissements du «Krusher» – incluant bien sûr son triomphe par décision contre Bernard Hopkins – étaient légèrement plus impressionnants que ceux des Terence Crawford, Roman Gonzalez ou Nicholas Walters.
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