Frank Cotroni en Saskatchewan pour le titre canadien

Par Laurent Poulin

La fiche de Frank Cotroni (11-7-1, 5 KO) est à l’image du guerrier qu’il est. Sans jamais avoir eu le support d’un promoteur, il fait sa route dans le difficile monde la boxe.  12 rounds a pris le temps de rencontrer le futur champion canadien avant son départ pour la Saskatchewan. Demain, il se battra contre Paul Bzdel pour le titre CPBC intérimaire des poids moyens. Francis Lafrenière, qui a déjà affronté les deux boxeurs, devra choisir s’il veut conserver son titre et donc affronter le gagnant du duel en Saskatchewan. 

En mai, après quatre défaites consécutives, Cotroni a surpris le Mexicain Pablo Munguia lors d’un gala de GYM. Il a accepté le combat 24 heures avant la pesée en remplacement du Roumain Flavius Biea. En plus de sauver la soirée de boxe, il a aussi relancé sa carrière. Dans une guerre de tous les instants, contre un mexicain venu pour l’emporter, il a très bien paru. Sa boxe était plus technique qu’à l’habitude et son endurance était surprenante pour un boxeur qui n’avait pas pu se préparer pour ce combat. Pour souligner son 3e combat en championnat canadien, nous vous proposons un retour en arrière sur le passé trop souvent méconnu de Frank Cotroni. 

Un long parcours parsemé d’embûches

Dès l’âge de 5 ans, il souhaitait faire de la boxe, mais sa mère a préféré l’inscrire à des cours de karaté. Jusqu’à 12 ans, il a fait son chemin dans cette discipline au point d’obtenir une ceinture noire. À l’âge de 13 ans, il déménage à Edmonton avec son père. Souhaitant continuer le karaté, il s’inscrit à la seule école qu’il trouve dans la capitale albertaine. Puisque le professeur est d’un niveau inférieur au sien, il n’a qu’une ceinture bleue, soit deux grades en dessous de la noire, il décide plutôt de s’inscrire au Cougar boxing club.

Rapidement passionné par mon nouveau sport, il se sent prêt à faire ses débuts amateurs après un an d’entraînement. Malheureusement, une attaque armée de la part d’un groupe asiatique va brusquement interrompre ce projet. Suite à de nombreuses coupures aux deux bras, ses deux bras ont dû être immobilisés en position horizontale pendant environ un an.

Cet accident et les nombreuses opérations qui ont suivies le ramènent à Montréal. Quelques années plus tard, une fois bien rétabli, il reprend l’entraînement de boxe avec comme mentor Dave Hilton Sr, qui avait encore à l’époque son gymnase à ville Lasalle. Le paternel de la famille Hilton lui enseigne les fondements de la boxe. Nous sommes alors en 2000 et Cotroni a le privilège de s’entraîner régulièrement avec Dave Hilton Jr qui remportera le titre mondial de la WBC en décembre face à la rose de Soweto, Dingaan Thobela.

Après deux années à Lasalle , il s’inscrit au club de boxe de l’Est, dirigé par Douggy Berneche. Il devient rapidement une tête d’affiche locale « Loin d’être le meilleur, j’ai une fiche de 3-3 après six combats. Par contre, je comprends rapidement ma valeur puisque je me retrouve presque toujours en finale, mon nom de famille et ma capacité à vendre des billets font la différence », affirme celui qui a 18 ans à l’époque.

Une rencontre inattendue l’amène à prendre le chemin de Mascouche. « Alors que je suis impliqué dans deux galas dans la même fin de semaine, je me rends seul à St-Jérôme pour mon second duel. J’y rencontre Éric Huard et la chimie entre nous deux est instantanée. Dans les jours qui suivent, je change de club pour rejoindre le club d’Éric à Mascouche. J’y deviendrai entraîneur, et ce, jusqu’à tout récemment », souligne celui qui a accumulé une fiche de 22-7 répartie sur un peu plus de trois ans.

De longues journées au travail puis au gym

Depuis deux mois, il a mis de côté son rôle d’entraîneur au club d’Eric Huard pour travailler dans la construction à temps plein. Autre changement d’importance, Cotroni est maintenant entraîné par Jessie Thompson et il fréquente le gym des frères Grant ce qui lui permet d’avoir accès à un plus grand nombre de partenaires d’entraînement. Depuis cinq semaines, il a fait beaucoup de travail technique et il promet que son style de boxe sera beaucoup plus “grounder”.

Certains boxeurs prennent de longs congés pour s’entraîner avant de monter sur le ring, Francesco n’a pas pu se payer ce luxe. Il a travaillé de longues journées, et ce jusqu’à une semaine avant son combat. Il se réveillait à 4 h 30 du matin pour se diriger vers son travail oû il démolit du béton toute la journée. Il finissait vers 15 h 30 et il se dirigeait au gymnase, rendu sur place, il prenait une douche pour ensuite dormir dans sa voiture en attendant son entrainement prévu pour 18 h 15. 

Le championnat canadien : Jamais deux sans trois

Comme on l’a mentionné plus haut, Frank Cotroni a présentement une fiche de 11-7-1, 5 KO et il n’a jamais eu l’appui d’un promoteur. En début de carrière, après seulement trois combats, il a vaincu par décision unanime Francis Lafrenière. À son 9e combat, il se bat avec Sébastien Bouchard au Centre Bell, il perd une décision après les six rounds. En 2015, il obtient la chance de se battre à quatre reprises, mais à chaque fois il doit s’incliner. Il est notamment vaincu par le vétéran Adam Green lors d’une décision partagée et contre David Théroux qui lui passe le KO au 5e round lors d’un combat endiablé. Trois de ses quatre combats à l’extérieur du Québec impliquent un titre canadien, voici un retour sur ces trois duels.

Steve Clagett le 13 septembre 2013 : Championnat canadien chez les 147 livres 

À Edmonton, Frank Cotroni était en train de remporter le combat sur les cartes des juges quand il a dû abandonner après le 5e engagement. Réussir à faire la limite de 147 livres était un trop gros défi et les conséquences de la déshydratation se sont fait ressentir. Il a même dû être hospitalisé en Alberta dans les jours suivants le combat.

Comme un malheur ne vient jamais seul, il doit aussi passer sous le bistouri pour une délicate opération au coude gauche. De son côté, l’Albertain Steve Clagett vient de remporter le combat le plus important de sa carrière contre un prospect du promoteur Roy Jones Jr. De son gain sur Cotroni, il a remporté 9 de ses 11 combats, s’inclinant par décision unanime contre Konstantin Ponomarev (3e IBF, 5e à la WBC et WBO) puis par décision majoritaire face à Chris Van Heerden.

Kevin Higson le 29 aout 2015 : Championnat canadien chez les 154 livres

À Mississauga en Ontario, dès la première ronde, Cotroni inflige une sévère coupure au boxeur diabétique ontarien. Par son style irrégulier et sa capacité à lancer des coups de tous les angles, Frank semblait parti pour la gloire. Toutefois, son coin est contraint à l’abandon après le 5e engagement, un de ses tympans a été perforé par un coup d’Higson.

Moins de 3 mois plus tard, Cotroni est de retour sur le ring à Sorel pour faire face à David Théroux. Après avoir dominé les 2 premiers rounds, en atteignant le Sorelois avec puissance, un Cotroni diminué par une main endolorie finira par voir l’arbitre mettre fin au combat. Un autre séjour à l’hôpital s’imposera pour faire des tests sur sa main droite, mais plus de peur que de mal.

Paul Bzdel le 22 octobre 2016 : Championnat canadien chez les 160 livres

Bzdel est une figure bien connue au Québec, c’est contre lui que Shakeel Phinn et Francis Lafrenière sont devenus champions canadiens. Il s’agira de son 4e combat de championnat canadien. Ni Phinn, Lafrenière et Brewer ne sont parvenus à lui passer le KO, on peut se douter que si l’occasion se présente, Frank la saisira. Son entraineur pour ce combat Jessie Ross Thompson a pu profiter des conseils de Lafrenière et Phinn pour bien préparer son boxeur.

Ce duel aura à Saskatoon, dans le même lieu que Shakeel Phinn a vaincu Paul Bzdel en février dernier. La finale de ce gala impliquera le titre canadien intérimaire des lourds Léger entre Frank White, un vétéran de 44 ans face à Gary Kopas que l’on a vu en 2014 contre Mitch Louis-Charles et Erik Bazinyan. 

La grande équipe de 12 rounds souhaite bonne chance à Frank pour ce combat. Dans une époque où les combats locaux sont de plus en plus compliqués à organiser, on doit saluer un guerrier qui n’a jamais reculé devant personne, parfois avec des délais de moins de 24 heures. Ramène la ceinture au Québec et pourquoi pas un combat revanche contre Francis Lafrenière pour 2017.

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