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Vanessa Lepage-Joanisse en championnat du monde

Vanessa Lepage-Joanisse et Stéphane Joanisse

Par Jean-Luc Autret

La jeune boxeuse de 22 ans, Vanessa Lepage-Joanisse (3-0-0, 1 KO) écrira une page d’histoire importante en montant dans le ring samedi à Cancun lors d’un championnat du monde de la WBC chez les poids lourds, évidemment féminin.

Sa rivale se nomme Alejandra « la tigresse » Jimenez (8-0-0, 6 KO) et elle détient la ceinture verte depuis mars 2016, lors de son sixième combat. Il s’agit d’un important coup d’éclat pour Vanessa, une boxeuse de l’Outaouais qui est sans soutien promotionnel. Nous en profitons aujourd’hui pour vous la présenter.

De l’athlétisme à la boxe

Rien ne destinait Vanessa à la boxe, encore moins en championnat du monde. Au secondaire, l’athlète de Providence performe en athlémisne en pratiquant différents lancers; le poids, le javelot, le marteau et le disque. Elle s’illustre aux Jeux du Québec en remportant deux médailles. Suite à une blessure à son genou gauche, sa mère l’encourage à pratiquer un autre sport.

Vanessa à l'entrainement« J’ai commencé la boxe en octobre 2011 avec comme seul objectif de me remettre en forme. Je n’avais pas tellement le goût d’essayer ça, il y avait que des gars dans le club de boxe de la Petite Nation. Mon frère m’a accompagné les premières fois et j’ai eu la piqure très rapidement. Après une semaine, j’avais déjà acheté tout mon équipement », nous explique celle qui est surnommée « Vany ».

Après un premier combat en juin 2012, elle gravit très rapidement les marches vers les plus hauts sommets. À son quatrième combat, elle se rend à Québec pour un duel Québec-USA organisé par François Duguay. Alors que Vanessa ne mesure que cinq pieds six pouces, une géante de six pieds quatre pouces lui fait face devant une foule silencieuse et douteuse. Ayant un fort caractère et beaucoup de détermination, Vanessa travaille au corps sa rivale et remporte le duel.

Vanessa sur le podium aux ContinentauxPar la suite, la boxeuse récolte de nombreux titres; dont lors des gants d’argents, des gants dorés, la Coupe Adidas et la Coupe du Québec. Elle décroche aussi le championnat canadien en 2013, 2014 et 2015 chez les plus de 81 kilos. En 25 combats amateurs, elle ne s’est inclinée que trois fois, dont lors de sa seule sortie internationale en finale des Continentaux à Guadalajara en septembre 2014. Une défaite très controversée qui la dérange encore. La FQBO lui décerne le titre de boxeuse de l’année en 2013 dans la catégorie des juniors.

Écarté des mondiaux de novembre 2014, malgré sa très belle performance contre l’Américaine au Mexique, elle et son entraîneur Stéphane Joanisse (qui n’a pas de lien de parenté avec la boxeuse) souhaitent s’orienter vers les 165 livres. Finalement, considérant que le chemin vers les olympiques de 2024 sera bien long. Ils préfèrent aller vers les professionnels dès l’été 2015.

Pas facile de se battre chez les pros

affiche du 21 févrierInitialement, Vanessa Lepage-Joanisse doit passer chez les professionnels en décembre 2015 au Nouveau-Brunswick. Mais sa rivale, Annie Mazerolle se blesse et le duel est reporté pour mars 2016. Puis, le 21 février 2016, elle doit affronter une Mexicaine lors d’un gala de Eye of The Tiger Management. Encore une fois, le duel est annulé, parce que sa rivale n’a pu obtenir son visa pour faire le voyage.

Enfin, le 19 mars 2016 à Moncton, c’est vraiment le grand jour. Face à l’invaincue Annie Mazerolle (2-0-0), Vanessa l’emporte par décision partagée (40-36, 37-39, 39-37). Deux mois plus tard, elle accorde un combat revanche à l’Acadienne lors d’un gala mis sur pied par Camille Estephan au Metropolis à Montréal. Le second duel est plus que clair, décision unanime (39-37, 39-37, 40-36) en faveur de Vanessa, qui recevra de nombreuses félicitations pour la qualité de sa prestation.

La boxeuse doit attendre jusqu’en décembre pour faire un troisième combat. Cette fois-ci, c’est le Groupe Yvon Michel qui fait appel à ses services, puisqu’ils organisent un gala au Casino du Lac Leamy le 23 décembre dernier. Vanessa s’offre alors son premier KO en forçant à l’abandon la Mexicaine Maria Jose Velis à la fin du troisième round et surtout, elle a le plaisir de performer devant ses amis et sa famille pour la première fois.

Malgré son style explosif et sa détermination, Vanessa ne reçoit aucune proposition de combats en 2017 de la part de GYM ou de Eye of the Tiger Management. Par contre, au début de juillet, son entraîneur Stéphane Joanisse est contacté par un représentant de Golden Boy Promotions qui lui offre un combat de championnat du monde pour le 29 juillet. Considérant le délai trop court, il refuse le duel, mais il renvoie immédiatement Vanessa au gymnase au cas que le téléphone sonne de nouveau.

Comme de fait, deux semaines plus tard, une nouvelle offre est faite au clan Joanisse. Cette fois-ci, l’entente se conclut et Vanessa montera dans le ring devant environ deux mille cinq cents spectateurs samedi à Cancun. Elle a pu se préparer intensément pendant cinq semaines en mettant notamment les gants avec la championne canadienne amateur Marija Curran, qui habite Ottawa.

Qui est « la tigresse » Jimenez ?

La boxeuse de Mexico City est âgée de 29 ans. Elle en sera samedi à son cinquième combat à Cancun en neuf affrontements. Lors de ses trois derniers combats, elle est montée sur le ring à des poids variants entre 225 et 230 livres. Tout comme pour Vanessa, ça ne semble pas facile de lui trouver des adversaires. Dans trois de ses quatre premiers combats, sa rivale en était à ses débuts pros, dans le quatrième duel, son adversaire avait une fiche de 0-3.

Selon le clan Joanisse, le Mexicain aime affronter des boxeuses de petite taille. Jimenez mesure cinq pouces de plus que Vanessa, mais, heureusement pour la Québécoise, celle-ci affronte régulièrement des boxeuses plus grandes qu’elle. Avantagée par sa grandeur et sa portée, la Mexicaine utilise bien sa taille. Malgré sa fiche de KO, elle ne semble pas avoir une force de frappe du plus haut niveau.

Voici la Mexicaine, lors de sa conquête du titre WBC en mars 2016 dans le même lieu que le duel de samedi. Elle affrontait alors la championne en titre, qui elle a obtenu la ceinture aux États-Unis en novembre 2014.

Le combat de samedi sera seulement la cinquième fois que le titre WBC des poids lourds chez les femmes (plus de 175 livres) sera en action, la première fois fut en 2007. Signe du peu d’activité à ce poids, les trois autres grandes associations (IBF, WBA et WBO) n’ont encore jamais sanctionné un combat de championnat du monde.

Soulignons aussi que cette soirée de boxe mettra en vedette le vétéran cubain Yuriorkis Gamboa qui se battra en ouverture de gala. Il s’agit d’un ancien champion olympique et champion du monde unifié chez les plumes que l’on a vue à Montréal en 2013. La demi-finale de la soirée sera le combat de Vanessa et en finale les mexicains verront à l’oeuvre Francisco Rodriguez Jr face au Philipin Elias Joaquin chez les poids mouches. La soirée présenté sur les ondes de Mexico Televisa devrait être disponible via ce lien. 

Un tremplin certainement

team VanessaDans le monde de la boxe féminine, ça peut aller très vite. Par exemple, Marie-Ève Dicaire, appuyée par GYM, est classée top 5 mondial par trois associations, et ce, après seulement huit combats. Chez les poids lourds féminins, le peu de concurrentes accélère de beaucoup la progression des boxeuses. Présentement, il y en aurait seulement trente d’actives sur l’ensemble de la terre selon boxrec et Vanessa est classé cinquième au monde. Considérant sa situation sans promoteur, Vanessa a très bon espoir d’utiliser ce combat de championnat du monde comme un tremplin. Peu importe le résultat du combat, elle aura réussi à participer à un combat de dix rounds en championnat du monde en moins d’un an et demi chez les pros.

David Lemieux et Vanessa« Pour la première fois de ma carrière, je ne ferai pas de déshydratation avant un combat. Lors de mes deux combats avec Annie Mazerolle je pesais un peu moins de 185 livres et contre la Mexicaine j’étais à 200 livres. Cette fois-ci, je prévois peser environ 225 livres. Je serai plus petite, mais elle ne sera pas plus forte que moi. Mon jeu de jambes est supérieur à elle et de plus elle n’a jamais affronté de boxeuse aussi mobile que moi. Plus le combat va avancer plus ce sera à mon avantage. Depuis que j’ai commencé la boxe, il y a sept ans, je fais du sparring avec mon entraîneur, qui a les mêmes mensurations qu’elle. C’est comme si on se préparait pour ce combat depuis sept ans !!! », affirme celle qui prendra l’avion jeudi matin en direction du Mexique.

Un peu à la remorque du UFC, la boxe professionnelle féminine est en plein bouleversement. L’Irlandaise Katie Taylor, 5 fois championne du monde et médaillée d’or en 2012, est rapidement devenue une coqueluche du public et vient de faire ses débuts en sol américain. La double médaillée d’or olympique Claressa Shields a déjà mis la main sur un titre et tous ses combats sont télévisés. L’Albertaine Jelena Mrdjenovich disputera bientôt son 50e combat en carrière au Rexall Center le domicile des Oilers d’Edmonton, elle y défendra alors ses deux titres mondiaux chez les poids plumes. La double médaillée d’or olympique Nicola Adams en Angleterre et la championne unifiée à 147 livres Cécilia Braekhus en Norvège sont aussi très populaires de l’autre côté de l’océan.

Gaetan Hart et VanessaAlors que la boxe féminine est en essor à travers le monde entier, Vanessa Lepage a pleinement le droit de rêver réveiller. Contrairement à Danielle Bouchard, qui a participé à un championnat du monde en Argentine en 2008 à l’âge de 41 ans, elle est au début de sa carrière et elle n’a que 22 ans.

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