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Kovalev-Ward 2 : la revanche

« Je veux le cogner, lui faire mal, et mettre un terme à sa carrière. Andre Ward n’est pas un vrai champion. » – Sergey « Krusher » Kovalev, ancien champion du monde unifié des mi-lourds WBA-IBF-WBO

« Je n’aime pas vraiment ce que ce type fait et ce qu’il représente… il y a certes de l’animosité entre nous. » – Andre« SOG  » Ward, actuel champion du monde unifié des mi-lourds WBA-IBF-WBO

Par Simon Traversy

Si les avis étaient partagés en prévision du combat entre Eleider Alvarez et Jean Pascal, les opinions l’étaient tout autant à l’issue du combat entre l’ex-champion unifié des mi-lourds WBA-IBF-WBO Sergey «Krusher» Kovalev, et le nouveau champion unifié des mi-lourds WBA-IBF-WBO Andre «Son of God» Ward. À deux jours de leur deuxième affrontement, j’ai décidé de faire un retour sur leur premier combat et de vous faire ainsi part de mes prévisions en vue de ce combat revanche tant attendu.

Pas juste un cogneur

Lorsque j’ai vu Sergey Kovalev à l’œuvre pour la première fois, c’était lors du gala de boxe du 30 novembre 2013 qui a eu lieu au Colisée Pepsi, à Québec. Kovalev affrontait alors Ishmail Sillakh en sous-carte du combat principal opposant le champion WBC des mi-lourds Adonis Stevenson à l’aspirant Tony Bellew. Même si Stevenson avait bien performé lors de ce combat, Kovalev lui a toute de même facilement volé la vedette avec un KO foudroyant qui a littéralement endormi le pauvre Sillakh au 2eengagement. Plusieurs fans, surtout les incrédules (détracteurs), ont rapidement étiqueté Kovalev comme étant un simple cogneur. Toutefois, je n’ai jamais été d’accord avec cette affirmation. Bien que le KO ait été rapide, j’ai tout de suite perçu Kovalev comme étant un boxeur-cogneur. Et plus il accumulait les victoires, plus mon hypothèse se vérifiait : sa biomécanique était excellente, ses coups étaient précis, il faisait preuve de flair et de patience, et il avait également une excellente notion du timing et de la distance, tous des atouts qui font souvent défaut au simple cogneur.

Dans mon livre à moi, Kovalev est non seulement un boxeur-cogneur, mais je trouve qu’il est davantage boxeur que cogneur. En revanche, Artur Beterbiev, que plusieurs qualifient également de simple cogneur, est lui aussi un boxeur-cogneur dans mon livre à moi. Cependant, contrairement à son homologue russe, Beterbiev est d’avantage un cogneur qu’un boxeur; car bien qu’il soit précis, méthodique, et qu’il calcule bien sa distance en plus d’être en excellente condition physique (toutes des qualités que le simple cogneur ne possède généralement pas) Beterbiev demeure néanmoins beaucoup plus expéditif, pour ne pas dire impatient à comparer au «Krusher». Le «roi Artur» cherche généralement coûte que coûte à disposer de son adversaire le plus rapidement possible, tel un cogneur, tandis que Kovalev préfère attendre le moment opportun avant d’assener le «coup de grâce» à sa victime. De plus, tel un cogneur, le boxeur d’origine tchéchène n’a aucun problème à «rentrer dans la bulle» de son adversaire, pour ne pas dire à l’envahir complètement, afin de le malmener de toutes les façons possibles à courte distance. En contrepartie, Kovalev a prouvé lors de son dernier combat qu’il n’était pas particulièrement à l’aise à courte distance.

Maladie du cogneur

Le problème avec les cogneurs, c’est qu’ils se fient surtout, pour ne pas dire exclusivement, sur leur puissance. Je ne dis pas que c’est nécessairement le cas de Kovalev et qu’il tourne ainsi les coins ronds à l’entraînement. Toutefois, on ne peut ignorer le fait que Kovalev ne se soit rendu au 12e engagement que 3 fois dans sa carrière professionnelle. Et sur ces trois fois, Kovalev n’a été dominant qu’une seule fois, soit contre une Bernard Hopkins à 61 mois d’obtenir sa carte du troisième âge. Toutefois, bien qu’il ait été tout aussi long, le combat que «Krusher» a livré à Ward était loin d’être à sens unique; à vrai dire, Ward est devenu meilleur et plus actif au fur à mesure que le combat progressait, ce que Kovalev n’a jamais vraiment été habitué et ce qui l’a déstabilisé.

L’envers d’être un cogneur

Le désavantage que tous les cogneurs ont, c’est qu’ils sont condamnés à l’emporter avant la limite, car à moins que les arbitres soient aveugles et que leurs adversaires aient l’air d’avoir été attaqués par un grizzli affamé, plus le combat s’éternise, plus les gens (incluant les juges) ont tendance à n’avoir d’yeux que pour l’adversaire qui a réussi à survivre la tempête. Avec une «distribution» toute américaine gravitant autour du ring, le Russe n’a pratiquement pas le choix d’arrêter Ward avant la limite. Et bien que Kovalev sache boxer, Ward est trop bon pour qu’il se fasse faire la barbe par l’ex-soviétique. Enfin, contrairement au premier combat, «SOG» connaît d’avance la recette pour neutraliser Kovalev.

Quand la partialité règne

Écoutez, je ne suis ni Russe, ni Américain. D’un point de vue «boxe», je préfère Kovalev, et d’un point de vue «classe», je préfère Ward. Donc, on peut dire que je suis assez impartial. Mais de grâce, est-ce que quelqu’un peut bien m’expliquer pourquoi les trois juges ainsi que l’arbitre étaient tous américains? Et surtout, peut-on m’expliquer pourquoi les trois juges ainsi que l’arbitre seront encore une fois tous américains, «toute la gang», lors du combat revanche? Oh et le combat a eu lieu à Las Vegas aux États-Unis et le combat revanche aura, bien sûr, encore lieu à Las Vegas. Je me demande vraiment comment les fans de Ward réagiraient si le combat revanche avait eu lieu à Moscou avec trois juges et un arbitre d’origine russe. Non mais, quand même… «y’a» toujours «bin» des limites à prendre le monde pour des «caves».

Ce que Kovalev doit faire pour l’emporter

Kovalev doit sortir en lion dès le premier son de cloche et travailler sans relâche jusqu’au dernier. Ward, comme tous les boxeurs cérébraux, préfère un rythme de travail plus lent afin de pouvoir analyser ce qui se passe devant lui et déceler ainsi les failles chez son adversaire. Kovalev doit donc faire en sorte que le boxeur d’Oakland se sente constamment «débordé sensoriellement». En étant constamment sur le qui-vive, Ward aura plus de difficulté à manœuvrer à sa guise. Kovalev doit donc se présenter en parfaite condition physique, lancer un volume élevé de coups en combinaison, feinter Ward, et il doit surtout travailler Ward au corps comme Ward l’a fait lors de leur premier duel…et pas seulement avec le jab, mais aussi avec des crochets aux flancs et des uppercuts dans le ventre, au sternum, et au menton.

Ce que Ward doit faire pour l’emporter

Tel que mentionné plus tôt, Ward connaît déjà en partant la recette pour neutraliser Kovalev, ce qui n’était pas le cas lors du premier combat. Il lui a fallu quelques rondes ainsi qu’un knockdown avant que le «fils de Dieu» ne se mette en branle. Il doit rouler les directs de Kovalev, le travailler au corps et le forcer à faire marche arrière en l’accrochant. C’est justement pour cela que j’ai bien dit «neutraliser» au lieu de «battre», car on va se dire les vraies affaires : Ward n’a pas battu Kovalev. Dans mon livre à moi, battre un adversaire signifie soit le déclasser de A à Z, soit faire de lui «l’heureux gagnant» d’une fin de semaine tout inclus aux soins intensifs de l’Hôpital général de Montréal. Ceci dit, si «AW» commence à désarmer Kovalev dès le premier engagement et ce, jusqu’à la fin, Kovalev aura beau dire après le combat que Ward frappe comme une fillette de cinq ans, cela ne changera en rien le fait qu’il se sera fait vaincre de façon convaincante par un boxeur tout simplement plus doué que lui. Après tout, Ward n’œuvre pas dans l’esthétique ou le spectaculaire, mais plutôt dans l’efficacité.

Conclusion

Alors voilà, j’espère seulement qu’on aura droit à un combat excitant et que les juges (ainsi que l’arbitre) seront justes dans leurs prises de décision. Aucun des deux boxeurs n’a signé de clause de combat revanche, donc peu importe le gagnant, un troisième combat n’est pas obligatoire. Si le combat est à la fois serré et enlevant, il serait toutefois logique que les dieux de la boxe accordent la victoire à Kovalev plutôt que Ward afin de forcer l’issue d’un troisième et ultime combat. Les combats de championnat opposant les meilleurs aux meilleurs, surtout les trilogies, sont si rares de nos jours (hein Adonis?), alors pourquoi pas. Après tout, c’est d’bonne guerre et on l’mérite pleinement. 

Simon says : Je prédis une victoire par décision partagée en faveur de Kovalev.

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