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Fausse note ou chant du cygne pour Chocolatito?

Par Carl Savard

Comme dans bien d’autres sports, la boxe comprend une panoplie d’impondérables pouvant mener aux grandes déceptions et aux grandes tristesses. De nos jours, les contrats de télévision et le grand nombre de fédérations ou d’associations empêchent fréquemment les fans que nous sommes d’avoir les combats que nous souhaitons. On peut être déçu de ne pas avoir eu droit au combat Mayweather vs Pacquiao alors qu’ils étaient au top ou de pouvoir seulement rêver à ce qu’aurait pu être un combat entre Joe Calzaghe et Carl Froch devant 90 000 personnes au Stade Wembley, mais en tant que fan de boxe ce qui m’attriste le plus est de voir la flamme d’une brillante carrière s’éteindre devant mes yeux. C’est exactement ce que j’ai ressenti le 9 septembre 2017 en regardant le combat entre Srisaket Sor Rungvisai et Roman « Chocolatito » Gonzalez.

Trébucher au sommet

Il y a un an et demi, le Nicaraguayen Roman Gonzalez était classé numéro un sur la liste des meilleurs boxeurs livre pour livre. Sa fiche comportait quarante-six victoires, aucune défaite et un impressionnant pourcentage de mise hors de combat de quatre-vingt pourcent. Il venait d’effacer le zéro de la fiche de Carlos Cuadras, vu lui aussi comme un des meilleurs chez les super-mouches, et plusieurs parlaient de sa fiche qui flirtait avec celle de Floyd « Money » Mayweather ayant accroché ses gants un an auparavant avec une fiche de 49-0, à une victoire du 50-0 de Rocky Marciano.

Pour plusieurs, Mayweather avait beau revenir pour un dernier combat, Chocolatito battrait le record en dedans d’un an ou deux. Ce scénario ne se présentera jamais, puisqu’en mars 2017 sur la même carte qui a vu Daniel Jacobs offrir une solide performance face à Gennady Golovkin, Roman « Chocolatito » Gonzalez a perdu un combat explosif face à Srisaket Sor Rungvisai par décision majoritaire. Les juges Glenn Feldman et Julie Lederman remirent des cartes de pointage de 114-112 en faveur de Sor Rungvisai alors que Waleska Roldan remettait une carte de 113-113.

Bien des experts et des amateurs de boxe sont restés avec l’impression que Sor Rungvisai en avait fait assez pour obtenir un match nul, mais pas une décision lui permettant d’enlever la ceinture au champion. Sor Rungvisai avait été pénalisé au sixième engagement pour coup de tête intentionnel alors que Gonzalez avait déjà été coupé au troisième sur un coup de tête jugé non-intentionnel par l’arbitre. De plus, Sor Rungvisai avait refusé d’engager le combat au douzième assaut ne faisant que reculer ou retenir après 11 rounds chaudement disputés.

Un combat revanche était évident et bien des gens croyaient que cette fois-ci, Chocolatito aurait appris du premier combat et que le deuxième se terminerait avant la fin par une victoire éclatante de Gonzalez. Il n’en fut rien. Le 9 septembre dernier, Chocolatito avait l’air éteint. Son énorme talent faisait surface lors de certains échanges, mais le cœur n’y était pas. Une défaite par K.O. au quatrième round menant directement à cette question: quelle sera la suite de l’histoire pour Roman Gonzalez? Ce dernier a annoncé que sa carrière n’était pas terminée et qu’il souhaitait un combat de championnat contre Kal Yafai et un éventuel troisième combat contre Sor Rungvisai. Les fans de boxe devront attendre de voir son prochain combat avant de se prononcer, mais Gonzalez ne serait pas le premier boxeur de grand talent à voir sa carrière dérailler en moins d’un an.

Les exemples du passé: Arturo Gatti

Il y a peu de combat plus triste à regarder que celui opposant Arturo Gatti à Floyd Mayweather. Rappelons-nous que Gatti était l’attraction à l’époque. Le boxeur excitant apprécié de tous. De l’autre côté, « Pretty Boy » Floyd Mayweather que la majorité des amateurs de boxe souhaite voir recevoir une raclée à sa première participation à la finale d’un gala sur la télévision à la carte. Ce soir-là Gatti n’est pas vieillissant, il est vieux et usé. Le sixième round en est un difficile à regarder alors que Mayweather frappe sans merci son adversaire comme un enfant s’acharnant sur une piñata. « Pretty Boy » est beaucoup trop fort pour « Thunder » sur tous les aspects. La carrière de Gatti en était à ses derniers balbutiements.

Chad Dawson

Entre 2008 et 2012, « Bad » Chad Dawson bat Glen Johnson et Antonio Tarver à deux reprises en plus d’Adrian Diaconu et Bernard Hopkins. En 2009, il apparaît dans le top 10 des meilleurs boxeurs livre pour livre du magazine The Ring. En 2012, « Bad » Chad accepte un combat contre Andre Ward à 168 livres. Un choix payant à court terme au niveau monétaire, mais dommageable pour sa carrière. Ward sert une leçon de boxe à un Dawson affaibli par la perte de poids. À son combat suivant, Chad Dawson se fait passer le K.O. par Adonis Stevenson en une minute. Malgré plusieurs tentatives, Dawson ne semble plus capable de remonter dans les classements.

Felix Trinidad

Avant d’affronter Bernard Hopkins, Felix Trinidad était l’enfant chéri de la boxe. Son palmarès comprenait des victoires face à Pernell Whitaker, Oscar De La Hoya, Fernando Vargas et William Joppy. Tout au long de ce combat mythique ayant lieu à New-York peu après les attentats du 11 septembre, les experts sont sans mot. George Foreman croit fermement jusqu’au septième ronde que la puissance de Trinidad fera le boulot et le sortira du pétrin. Il n’en fut rien. Hopkins domine et remporte le combat par TKO au douzième assaut. Bien que Trinidad ne pris sa retraite que quatre combats plus tard suite à des défaites contre Winky Wright et Roy Jones Jr, c’est définitivement en 2001 que les lumières se sont éteintes sur sa brillante carrière. Hopkins aura d’ailleurs plus tard le même effet sur la carrière de Kelly Pavlik.

Trouver son Freddie Roach

La réponse aux deux dernières défaites de Roman Gonzalez se trouve peut être dans son incapacité à passer par dessus la perte de son entraîneur Arnulfo Obando, décédé suite à un AVC deux mois après sa victoire face à Carlos Cuadras. L’attitude de Gonzalez était différente lors du premier combat contre Sor Rungvisai. De plus, lors du deuxième duel, on aurait dit que personne n’avait réussi à le convaincre qu’il méritait le premier et pourrait gagner ce deuxième affrontement. Gonzalez travaillait avec Obando depuis 2010 et ce dernier lui avait permis d’atteindre les plus hauts sommets. En tant que fan du noble art, j’attends avec impatience de voir remonter Chocolatito dans un ring, mais mon souhait le plus cher est qu’un entraîneur puisse avoir le même effet sur lui que Freddie Roach a pu avoir sur la carrière de Miguel Cotto avant qu’il n’accroche ses gants.

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